Mes Alsaces est une chanson qui existe depuis longtemps, elle a connu d’autres formes, d’autres paroles. Pourquoi la sortez-vous aujourd’hui ?
Il était temps de la terminer. Il existe au moins vingt versions en maquette. Je l’ai même jouée lors d’une tournée en Allemagne en 1995. Pendant le confinement, je me suis dit : « Si tu ne devais sortir qu’une chanson, laquelle choisirais-tu ? » J’avais vraiment envie de faire un titre qui n’a rien à voir avec ce que j’ai fait avant. Souvent les chansons sur l’Alsace sont dans l’autodérision. Je voulais faire un truc en français, mais pas uniquement pour dire que l’Alsace c’est super, que c’est la plus belle région de France.
Cette Alsace qui envoûte, qui étonne comme vous le chantez…
Ce sont les gens qui la composent. Ce que j’aime dans cette région c’est cela. L’Alsace ouverte, plurielle. Et puis, je n’aime pas ce discours actuel pour sortir l’Alsace du Grand Est, je trouve ça presque insultant pour les autres régions, du genre, on est l’Alsace, on ne va pas se mélanger avec les Lorrains. L’Alsace sera toujours l’Alsace, il y aura toujours de la tarte flambée, des gens qui parleront alsacien. Ma chanson est aussi une réaction contre cette vision étriquée de l’Alsace repliée sur elle-même.
Vous avez dit qu’il y a autant d’Alsaces que de gens qui l’aiment.
Oui, je dis même que l’on n’a pas besoin d’être Alsacien pour l’aimer. Certains qui ne sont pas Alsaciens sont plus dignes de l’aimer que ceux qui y vivent et qui sont racistes. Pour moi, ces gens-là aiment mal l’Alsace.
Vous avez toujours été militant, en défendant ces valeurs-là. C’était déjà le cas dans votre tube Yaka Dansé !
Oui, c’est vrai. Mes Alsaces est une chanson qui n’est pas très loin de Yaka Dansé finalement. Dans les années 80, elle était un peu une ouverture sur le monde. J’avais envie de quitter cette région dans laquelle je me sentais trop à l’étroit. Finalement Mes Alsaces c’est le voyage retour. Je reviens, mais avec un autre regard sur ma région. Les deux titres se rejoignent. Yaka Dansé c’est le côté universel du message.
Dans votre carrière, l’idée du beau voyage, du mouvement, est très présente !
Oui, cela doit être aussi une fuite. Probablement. Moi, j’aime bien partir, mais j’aime bien revenir. Beaucoup plus qu’à une époque.
Et, ce qui est formidable, c’est que votre vie est toujours faite de voyages, grâce à Yaka Dansé !
Exactement. Depuis trois ou quatre ans je tourne beaucoup plus, encore plus qu’à l’époque. J’ai beaucoup de chance d’être demandé régulièrement. Yaka Dansé est mon passeport. C’est incroyable. Pourtant, j’ai longtemps cru que tout était terminé pour moi.
Que chantez-vous sur les tournées ?
Je fais Yaka Dansé, mais aussi un medley reggae avec des titres de UB 40, Jimmy Cliff, Lavilliers et Bob Marley. Il y a un passage acoustique ou je fais Pour un flirt, et puis avec les autres artistes, on chante du Goldman. Sur d’autres tournées, je fais Gimme Hope Joanna d’Eddy Grant, Femmes du Congo le 2e tube de Raft, ou encore du Zouk et même du Manu Chao.
À part ça, qu’est-ce qui vous rend heureux dans la vie ?
Vous savez que je suis jeune marié ? C’est ma vie qui me rend heureux, la chance que j’ai à 63 ans de continuer à faire de la musique, à partir, à revenir, à emmener ma femme sur certains concerts, à faire partager tout ça. Je suis en bonne santé, je me sens privilégié.
Que dire du monde dans lequel nous vivons ?
Je trouve que les gens sont de plus en plus agressifs, sans doute à cause des difficultés qu’ils rencontrent. Les problèmes climatiques commencent à se voir. On sent que l’avenir n’est pas rose, ce qui fait que les gens prennent ce qu’ils peuvent prendre. Ils ont peur. Il y a un truc qui monte. Je peux me tromper, c’est peut-être un discours de vieux con, mais je crois que l’on ne va pas vers le mieux. L’Homme n’est pas prêt à renoncer à ses avantages. On est assez hypocrites, on a tous des téléphones alors que l’on sait que pour les fabriquer et les faire fonctionner on pille la planète. Je ne comprends pas ce que l’on attend pour utiliser les technologies qui polluent moins.