Nous sommes en 1944, les troupes alliées ont repris la Normandie aux soldats du IIIe Reich et font route vers Paris. En tête de ce cortège libérateur se trouve le Président américain Eisenhower, battant l’asphalte au volant d’un véhicule qui rentre alors dans la légende, la Jeep Willys dont le nom commercial deviendra CJ puis Wrangler. Depuis, chaque nouveau modèle n’est pas jugé à l’aune de ce qu’il apporte en termes d’amélioration et de modernité, mais bien au regard de sa loyauté envers son illustre lignée. Difficile, alors, de se plier aux injonctions d’une époque qui a davantage les yeux rivés sur les taux de CO2 que sur les livres d’histoire. Pour continuer sa route, la Wrangler doit s’adapter et cela passe nécessairement par l’électrification de ses moteurs. Exit, donc, les blocs thermiques, place à l’hybridation rechargeable.
Révolution douce
La tentation a dû être grande, dans le bureau d’études de Jeep, de céder aux sirènes esthétiques de l’époque. Le succès du Renegade, qui s’est rapproché des SUV, a dû peser. Mais les défenseurs de l’orthodoxie ont tenu bon. Contrairement au Mercedes Classe G ou au Land Rover Defender, la Wrangler ne fait aucun compromis avec ses yeux ronds poussés en bord de pare-brise, sa calandre verticale, ses ailes avant dissociées du capot ou ses formes comme tracées au fil de plomb. Même d’un point de vue technique : le châssis demeure à l’échelle, la transmission intégrale enclenchable avec réduction et ressorts à lames.
Certes, l’habitacle se fait plus accueillant avec un empattement élargi de 2 cm et l’équipement est proche de ce que proposent les SUV modernes. Mais le confort reste rustique : c’est brut, c’est rugueux, parfois à la limite du confortable, toujours dépaysant. Le Wrangler offre une expérience unique en son genre. Ses défauts font sa singularité. Cette intransigeance est toutefois incompatible avec la fiscalité environnementale actuelle. Le malus de 30 000 € frappait les versions thermiques, rendant impossible toute prétention commerciale. Le catalogue se réduit donc naturellement à la seule version hybride rechargeable.
Formule gagnante
Sous le capot, c’est le 2 l essence turbo de 272 ch qui officie, associé à un bloc électrique de 145 ch intégré à la boîte de vitesses et à un autre moteur de 61 ch qui sert de générateur. Ce dernier permet de boucler environ 50 km en tout électrique et de profiter de la pleine nature dans un silence absolu. En ville, l’agrément de l’électrique fait vite oublier l’entorse faite à l’histoire. Le gabarit imposant donnera toutefois rapidement envie de fuir les centres-villes surchargés pour battre la campagne. Le temps de gagner les sentiers de traverse, on sera surpris par le dynamisme routier de la Wrangler et on se rappellera que l’ensemble est tout de même porté par 380 ch et 637 Nm de couple, offrant des performances proches d’une berline compacte sportive. C’est hors piste que la Jeep montre une nouvelle fois toute sa classe de franchisseuse hors pair. Le passage à l’hybride n’altère en rien ses capacités exceptionnelles… qu’elle ne brade pas ! Le ticket d’entrée est à 68 200 € ! Le prix d’une légende qui se met dans l’air du temps.