samedi 23 novembre 2024
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16 000 fois Éric Vial

Il y a 6 ans, au moment de la création de Maxi Flash, il a été notre 2e invité. À l’époque, il était très présent dans la vie publique, leader de l’opposition à Brumath et il poursuivait une belle carrière de syndicaliste en chef du groupe France télévisions. Depuis deux ans, il est revenu à ses premières amours, l’antenne de France 3 en Alsace et dans le Grand Est, avec à 9h une chronique sur le terroir dans « Vous êtes formidables » et un module dans le 18h30. Et puis, comme on ne se refait pas - chez lui l’engagement est culturel, son grand-père était communiste et sa famille espagnole opposée aux idées de Franco - il a besoin de dire, d’échanger, d’essayer de faire changer les choses. Ulcéré par le GCO, au mois de décembre, il a écrit un texte sur Facebook sans imaginer qu’il serait partagé 16 000 fois et à l’origine de la création d’un collectif des usagers de la M35 / A35. Rencontre avec un homme très suivi.

Votre papier Malhonnêteté Géographique a été partagé 16 000 fois sur Facebook, c’est énorme !

Il paraît qu’en moyenne, Macron fait 800 partages, et j’en ai fait 16 000. Bon, je n’aime pas froisser ou diffamer les gens, je fais toujours attention, mais je suis grande gueule quand même. Je fais mon métier, comme un lanceur d’alertes, mais sans agressivité, c’est mon tempérament. Tout le monde fait le constat que la nouvelle signalétique du GCO est stupide, mais personne ne le dit. Et personne ne se met à la place des utilisateurs, des usagers. Personne ne reconnaît qu’il y a quand même un problème. En fait, avec ce petit post, je me suis juste mis à la place des gens. Je pense qu’il a été médiatisé pour cela, ils se sont sentis concernés.

Mais, Éric, on voit bien qu’il est écrit « péage » sous Strasbourg sur les nouveaux panneaux, non ?

Ce n’est pas la question. La direction gratuite n’est pas indiquée. Je ne vais pas refaire mon article, mais il n’y a qu’une direction indiquée pour Strasbourg. Facebook m’a appelé pour confirmer mon identité, des politiques m’ont appelé. Des gens très influents aussi. Il y en a qui se sont excusés, certains m’ont avoué qu’ils avaient fait une connerie. J’ai eu des témoignages écrits. J’ai été contacté par de nombreuses personnes qui m’ont dit que l’on ne pouvait pas laisser passer ça. Il y a eu énormément de réactions. Une page Facebook est née, un collectif des usagers de la M35 / A35. On sent que les gens veulent aller plus loin et faire changer les choses. Alors, on peut dire, comme le Préfecture, que les choses vont se mettre en place, que les gens vont prendre l’habitude, mais les autres, les touristes par exemple, on se fout un peu de leur gueule. Et puis, on nous donne des arguments fallacieux, on nous dit que l’on peut utiliser un GPS…

La photo prise par Éric Vial pour illustrer son post partagé par 16 000 personnes sur Facebook. / ©Documents remis
Quel est le fond du problème ?

Pour moi, ils n’ont pas été suffisamment transparents. Si l’on tire la ficelle de tout cela, il y a plein d’implications. Le fond du problème est que l’objet du GCO est fallacieux. Ce n’est pas un contournement. Et ça, personne ne l’a expliqué, à aucun moment. Personne n’a dit, le GCO est une nouvelle entrée sur Strasbourg. Le problème est là. On nous l’a vendu en disant que les camions allaient passer par là, que cela sera mieux, mais ce n’est pas l’objectif. L’objectif est de faire entrer les gens à Strasbourg par une voie payante. Alors, vous allez me dire, oui, comme dans d’autres villes. OK, mais soyons transparents. Qui vient travailler à Strasbourg tous les matins ? Les travailleurs n’ont pas les moyens de payer en gros 5 euros par jour. Dans le contexte actuel, il y a quand même des questions à se poser. Cela me dérange que l’on ne soit pas clair avec les gens dans un moment où ils vivent quand même des fins de mois difficiles. Il y a des politiques qui m’ont dit qu’ils avaient peur que le GCO ne fonctionne pas et que c’est pour cette raison qu’ils n’ont indiqué qu’une direction. En fait, les pouvoirs publics nous ont trompés. La vraie question est la rentabilité de cette autoroute. J’ai beaucoup travaillé là-dessus. Et puis en fait, l’objectif à moyen terme est de fermer les entrées nord et sud, d’en faire des boulevards urbains et de récupérer le foncier, de construire, d’agrandir Strasbourg, et de faire passer les gens par une seule entrée, payante. Un élu de la CEA que je connais bien m’a appelé et m’a dit que c’était vrai, il m’a dit qu’aujourd’hui les panneaux de direction sont faux, mais que dans quatre ans ils seront justes. Pourtant, en 2017, le projet était d’indiquer Strasbourg, pas Schiltigheim lorsque l’on vient de Haguenau ou de Brumath.

Du coup, grâce à vous, à ce papier et à votre engagement, lorsque l’on veut aller à Strasbourg, on fait attention, on prend la bonne direction, pas le péage !

Oui, mais il y a quand même quelque chose qui me chagrine, moi qui aime la politique et les politiques, c’est qu’à chaque fois que les citoyens vont prendre la direction Schiltigheim, ou Illkirch-Graffenstaden dans l’autre sens, ils auront une pensée négative pour les pouvoirs publics et pour les politiques. Ils se diront à chaque fois, on se fait avoir, on nous ment. Dans le contexte actuel, c’est terrible. On vit dans une époque où les gens ont l’impression de se faire arnaquer tout le temps. C’est pour ça que je milite. J’apporterai mon aide au collectif pour que l’on modifie les panneaux directionnels. Lorsque l’on me dit que les gens savent maintenant quelle direction prendre, et que pour les touristes tant pis, je me demande comment on peut avoir une pensée comme celle-ci.

En vous écoutant, je me dis que, vous qui avez essayé la politique, vous devriez vous y remettre !

Je ne sais pas si j’ai essayé la politique ! Je me suis présenté à la mairie de Brumath, contre Étienne Wolff, c’est du local. Je me suis aussi présenté aux législatives, mais comme suppléant. Faire de la politique, c’est appartenir à un groupe et moi, je suis comme beaucoup de gens, je suis pour l’intelligence, je ne suis pas pour la connerie. Par exemple pour le GCO, il y en a qui vont justifier cette connerie parce qu’ils appartiennent à un groupe. Moi, je ne sais pas de quel groupe je suis. Ce n’est pas parce que j’ai fait 16 000 partages que je vais me lancer en politique, au contraire. Je préfère le débat citoyen, pour aider les hommes politiques. J’ai du respect pour ceux qui s’engagent et c’est pour ça que je veux me servir de ce qui vient de se passer pour leur demander d’avoir l’intelligence de revenir en arrière, maintenant, pas dans quatre ans. Aujourd’hui, les politiques ne prennent plus les responsabilités. Plus aucun. C’est cela qui ne va pas dans ce pays. Mes 16 000 partages montrent la déconnexion totale du monde politique avec les gens d’en bas. C’est aussi une réponse à l’abstention. Les 16 000 partages, ce n’est pas moi qui aurais dû les avoir, ce sont les politiques.

Après une belle carrière de syndicaliste pour France télévisions, vous avez tout arrêté il y a deux ans, pourquoi ?

Il y a deux ans dans le train, j’ai parlé avec Bernard Stalter, le président de la Chambre des métiers, c’était juste avant sa mort. Quand on se croisait dans le TGV, on prenait un verre au bar. Je me souviens de notre dernière discussion, on s’est dit qu’on en avait marre des conneries, marre des conflits, il m’a dit « fais attention Éric, il faut profiter, on ne sait jamais ». Quand il est mort, ça a été un révélateur. 15 ans d’investissement à Paris, loin de ma famille, c’est ça l’engagement, tu ne vois pas tes gosses grandir, ce sont des sacrifices, je me suis rendu compte que j’étais cramé ; on ne peut pas être syndicaliste toute une vie. Peu de temps après, j’ai tout arrêté, du jour au lendemain.

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