Journées de mobilisation, grogne nationale, enjeux politico-économiques, injonctions écologiques… la guerre des carburants a bien lieu et cristallise bon nombre des passions de notre époque. Mais que reste-t-il lorsque l’on réduit le brouhaha ambiant ? Tentons de démêler le vrai du faux.
Le diesel pollue plus que l’essence : Vrai
C’est la pierre angulaire de l’argumentaire soutenant la politique d’augmentation du prix du diesel. L’objectif de ces mesures est d’encourager la transition écologique et de réduire durablement le parc de véhicules diesels. En cause, le caractère très polluant du gazole. Or, plusieurs arguments pourraient jouer en sa faveur. Les moteurs qui utilisent ce carburant, par exemple, consomment moins. Son appétit est, en moyenne, de 6,07 l/100 km contre 7,31 pour un bloc essence. Cela représente tout de même une différence de près de 20 % et l’on pourrait s’attendre à ce qu’un véhicule diesel rejette de fait moins de particules nocives que son homologue essence. Pourtant, un litre de gazole émet 2,6 kg/l de CO2 contre 2,3 pour l’essence. Le cycle de production de la voiture est également plus polluant. Sur l’ensemble de son existence, un modèle diesel rejetterait ainsi 10 % de CO2 en plus. En outre, il n’y a pas que le dioxyde de carbone qui représente un danger pour l’environnement et la santé : les particules d’oxyde d’azote émises par les moteurs diesels sont elles aussi un véritable fléau.
Les moteurs diesels récents ont réglé le problème : c’est vrai… en partie
Les défenseurs du diesel avancent souvent cet argument massue : les modèles récents sont équipés de filtres à particules fines qui captent jusqu’à 99,9 % d’entre elles. Dans l’ensemble, on ne peut constater que les véhicules d’aujourd’hui rejettent moins de gaz nocifs que les vieilles voitures. Les normes Euro, qui se sont multipliées depuis les années 90, ont largement épuré le parc automobile. Même s’il est difficile d’avoir des études réellement indépendantes, la plupart des recherches montrent que les meilleurs diesels peuvent en effet moins polluer que les moteurs essences. Toutefois, on a pu constater récemment que les grands constructeurs « trichaient » sur les chiffres et leurs émissions réelles. Le scandale du dieselgate est là pour en témoigner. Plus inquiétant encore, en février dernier, Thomas Bourdel, un médecin radiologue de Strasbourg, pointait l’existence de particules ultrafines (d’un diamètre inférieur à 0,1 µm). Selon ce spécialiste, 90 % des particules émises par les moteurs diesels de dernière génération se rangent dans cette catégorie. Or, c’est bien la finesse des particules qui en fait la dangerosité.
Les taxes servent uniquement à la transition écologique : c’est faux
Il est indéniable que le prix des carburants explose. En un an, le diesel a pris +20 % et l’essence +14 %. La principale responsable de ces hausses est l’augmentation du cours du baril de pétrole. Cependant, la taxe intérieure sur la consommation de produits énergétiques (TICPE) apporte sa pierre à cet édifice funeste pour le pouvoir d’achat : +7,6 centimes pour le prix du litre de gazole et +3,9 centimes pour le litre de super. Et cela ne va pas s’arrêter : le projet de loi de finances 2019 prévoit une nouvelle vague de 6,5 centimes sur le diesel et de 2,9 centimes pour le super en janvier prochain. Au total, ce seront 3,9 milliards de plus qui iront dans les caisses de l’État. Ainsi, la TICPE devrait rapporter 37,7 milliards d’euros au total en 2019. Sur cette somme, 17 milliards iront directement dans le budget général de l’État, 7,246 milliards à la transition écologique – servant, au passage, à rembourser une partie de la dette d’EDF –, 12 milliards pour les collectivités territoriales et 1,2 milliard pour les réseaux routiers. Le budget pour la transition écologique reste donc stable et, de fait, sa proportion dans les allocations globales est en baisse : elle représentait 20 % en 2017, 21 % en 2018 et ne s’élèvera plus qu’à 19 % en 2019.