Jérôme Fischer, Langage fleuri

Né à Wissembourg en 1995, le futur fleuriste Jérôme Fischer vit à Hoffen. Passionné par les fleurs depuis son enfance et actuellement en CAP, il est l’un des lauréats du Prix régional 2020 pour l’égalité et la mixité de la Région Grand Est (signataire de la Charte européenne pour l’égalité des femmes et des hommes dans la vie locale). 100 jeunes de 15 à 30 ans, qui ont fait le choix de se former dans des domaines traditionnellement destinés au sexe opposé, ont été récompensés et ont empoché chacun 400 euros. La question de l’égalité entre les femmes et les hommes, en particulier la discrimination liée au genre, se pose dès le plus jeune âge : éducation, formation, parcours professionnel, liberté de circulation et accès aux espaces publics, sécurité et intégrité physique, toutes ces problématiques sont encore aujourd’hui source d’inégalités. Rencontre avec un jeune homme bien dans son époque.

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Racontez-nous votre parcours jusqu’à maintenant ?

J’ai d’abord fait un CAP horticulteur, j’ai travaillé comme horticulteur, puis dans une grande surface au rayon jardinage. Le métier de fleuriste m’a toujours intéressé. J’ai su très jeune ce que je voulais faire. Actuellement, je termine mon CAP fleuriste et je travaille dans un magasin à Koenigshoffen. Je cherche une place en brevet professionnel. Ensuite, je ferai un BTM, et j’espère ouvrir ma propre entreprise, un magasin de fleurs. Plutôt dans une grande ville, Haguenau, Soultz-sous-Forêts, Wissembourg, ou pourquoi pas Strasbourg. 

Comment est née cette passion ? 

C’est ma tante qui aimait beaucoup les fleurs. Elle vivait à Hunspach. Petit, j’étais tout le temps chez elle. J’ai découvert tout ça, les géraniums surtout. Elle était agricultrice, tout ce qu’elle semait, ça poussait. Tout cela me passionnait. J’offrais beaucoup de fleurs à mes amis forcément, des bouquets ou des plantes si la personne avait la main verte. Maintenant, mes amis sont moins surpris.

Pour vous, que signifie cet acte d’offrir des fleurs ?

Ça fait toujours plaisir d’avoir des fleurs à la maison, c’est de la gaieté. 

Le prix régional que vous avez remporté permet de lutter contre la persistance des stéréotypes de genres. Pourquoi avez-vous eu envie de
participer ? 

On me l’a proposé au CFA. Il fallait remplir un questionnaire et j’ai immédiatement accepté, j’ai vraiment dit ce que je pensais, c’est venu tout seul, car les mentalités doivent changer. On croit toujours que le métier de fleuriste est un métier féminin. Alors que, si on revient en arrière, il y a 50 ans il y avait plus d’hommes que de femmes dans ce métier. Ma patronne m’a souvent dit ça. Maintenant ça revient peu à peu ; cette année dans ma classe il y avait trois garçons. Alors qu’en première année j’étais le seul garçon, cette année ils étaient quatre. 

Avez-vous le sentiment d’avoir un combat à mener ? 

Oui. Forcément, c’est quand même un petit combat. En maçonnerie, il y a maintenant des femmes, comme en métallurgie. Dans notre CFA, il y avait beaucoup plus de femmes en boucherie, en ébénisterie. Les choses changent progressivement. C’est très important d’avoir la liberté de choisir son métier. 

« Ma maison est la plus fleurie du village. Tout cela c’est grâce à ma tante qui malheureusement n’est plus là, mais qui m’a transmis sa passion » Jérôme Fischer ©EG

Qu’avez-vous ressenti en recevant ce prix ? 

Ça m’a fait super plaisir, je n’y pensais vraiment pas. Même si j’adore les défis, les concours. J’ai gagné quatre cents euros… J’ai offert des fleurs et je garde le reste pour mes vacances.

Avez-vous été discriminé dans votre vie ?

Non, mais c’est arrivé à beaucoup de personnes que je connais, avec par exemple des parents qui ne sont pas du tout d’accord avec le choix de leur enfant. Mes parents étaient super contents que je fasse cela. Bon, mes grands-parents un petit peu moins, ils m’imaginaient dans la manutention ou dans une usine, mais ils ont compris.

Parlez-nous de ce que vous avez appris à l’école !

Déjà, c’est un métier de mode. Les fleurs sont périssables. Par exemple pour les mariages on fait des bouquets classiques en fonction des saisons. On apprend que l’on ne retrouve pas la pivoine en été ou en hiver, plutôt autour de la fête des Mères et pendant un mois. Un bon fleuriste est quelqu’un qui connaît les noms des fleurs et des plantes. C’est un long travail, il existe énormément de variétés de fleurs. En horticulture, j’en ai appris 500. Je dirais que j’en connais 5 %. On ne peut pas tout connaître. Par exemple, il y a beaucoup de variétés de bégonias. 

Quelle est votre fleur préférée ? 

C’est difficile à dire, mais c’est quand même la pivoine. Et ma plante préférée, le rhododendron. 

Vous me confirmez que si l’on offre un cactus à quelqu’un, c’est qu’on ne l’aime pas vraiment ?

Oui, c’est ce qu’on dit. 

Vous connaissez le langage des fleurs ? 

Oui, ça me parle beaucoup, par exemple le lys blanc signifie la pureté, bien sûr les roses rouges c’est l’amour, la passion. La rose rose c’est plutôt l’amitié. On peut offrir des fleurs à n’importe qui et je pense que de plus en plus d’hommes attendent des bouquets, surtout en ce moment, après cette incroyable période.  

Vous participez également, avec succès, à des concours de fleurissement (voir photo) !

Oui, depuis plusieurs années. J’en ai gagné quelques-uns. Ma maison est la plus fleurie du village. Tout cela c’est grâce à ma tante qui malheureusement n’est plus là, mais qui m’a transmis sa passion. Et cette passion, je la vis à fond.