Au fond de sa parcelle de 100 m², agenouillé sur une rangée de pommes de terre, David Belhaddad constate que les doryphores attaquent ses plants. Mais il ne prendra ni produits phytosanitaires, ni aucune mesure avant l’an prochain : « Plus on intervient, plus on se bat contre la nature, explique-t-il. L’objectif est de vivre en synergie, et de lui apporter la solution ». Parfois, il faut des leurres, parfois des associations de cultures, et « c’est une réflexion que les agriculteurs n’ont plus ».
David sait de quoi il parle : à 32 ans, après avoir travaillé dans des laboratoires sur les commandes de plants transgéniques des grands groupes propriétaires à la fois des semences et des pesticides, l’ingénieur en agronomie a « choisi de faire des expérimentations in vivo plutôt que dans des tubes à essai ». Aujourd’hui, il se considère « à l’autre bout de la chaîne » et se procure des graines biologiques, libres de droits et reproductibles, qu’il cultive « au feeling, pour les adapter aux conditions, et communiquer avec dame nature ». Pas besoin du label bio d’ailleurs, « je n’ai rien à cacher, c’est une question de confiance ».
« La part des petites bestioles »
Ici, les plants de tomates verticaux côtoient ceux au sol, les premiers pour parer au mildiou, et les seconds parce que « c’est une aberration de les tutorer et de les tailler, chaque rejet donne des fleurs et donc des fruits ». David teste aussi les oyas, ces pots en terre cuite semi-enterrés remplis d’eau, sans grande conviction ; la culture en buttes, « une structure de matériaux organiques dans laquelle les plants puisent dans le bois drainant » ; la montée en fleurs des derniers légumes de la saison : « C’est la part que je laisse aux petites bestioles… ».
Artichaut, shizo, poire de terre, curcuma, kiwano, David s’essaie à l’originalité, et plante plus ou moins tard, peu attiré par la productivité. Ses parents retraités lui prêtent main forte et son grand-père lui a transmis son verger… «La solidarité est un des piliers de la permaculture», avance-t-il. Un petit marché a ainsi lieu au 7 rue de l’École, et il anime des ateliers pédagogiques : « Le but, c’est partager, transmettre, échanger, aller sur le terrain, montrer et faire bouger les choses ». Il suffit par exemple d’une bande de fleurs mellifères pour voir revenir papillons et coccinelles, et assurer le futur.