Alfred Jung, le président et fondateur de l’association théâtrale de Geudertheim est un « irréductible ». Il fait partie de la génération à qui on faisait copier 100 fois « je ne dois pas parler alsacien à l’école ». Bien plus tard, il deviendra l’un des premiers lauréats des « Schwälmele », un prix qui récompense les personnes engagées dans la défense de la langue. Depuis la création de l’association en 1984, il a écrit une vingtaine de pièces en alsacien. « Des pièces sans prétention », dit-il avec amusement, faites « juste pour faire rire autrement, en sortant des sentiers battus », même si, conscient du désintérêt croissant des jeunes pour l’alsacien, il s’est attaché à les rendre ludiques et accessibles.
Rendre à César
En résumé, voici comment débute l’histoire : « Deux fillettes de Geudertheim étudient l’histoire de la Gaule lorsque Panoramix les envoie en l’an 52 av. J.-C., à Geudertheimus, tout proche de Brocomagus (Brumath) ». Au fil de la pièce, elles rencontreront Astérix, Obélix, Falbala, César et d’autres personnages pour des aventures autour du secret de la potion magique. Le tout, évidemment en alsacien. Alfred Jung a voulu innover en adaptant des œuvres populaires dans sa langue maternelle. Il a d’abord porté sur les planches une émission télévisée (L’Amour est dans le pré, en 2017), puis deux films (les gendarmes de Saint-Tropez, en 2018 et Don Camillo, en 2019), et enfin, « Astérix et Obélix » en 2020. Selon lui, en créant ces nouvelles pièces, en plus de lui permettre de se renouveler, l’association perpétue la longue tradition du théâtre alsacien à Geudertheim.
L’Alsace, ma bataille
Dans cet hommage revisité d’Astérix, il est logiquement fait mention des liens qui unissent la civilisation gallo-romaine à l’Alsace. D’une autre manière, lorsqu’on se met dans la peau de la fillette alsacienne et que l’on observe la langue latine de l’extérieur, c’est un langage complexe, disparu comme l’alsacien pourrait le devenir. C’est une relique. Un aveu que la langue ne peut pas toujours être sauvée, comme le déplore en partie le président de la troupe : « Le point de non-retour est atteint dans beaucoup d’écoles et d’autres milieux, l’alsacien est devenu une langue étrangère, comme le latin est devenu une langue étrangère autrefois pour d’autres ».
Ces représentations sont importantes pour leur vocation à préserver la langue. Dans le cas des pièces de l’association théâtrale de Geudertheim, elles apportent un nouveau genre au registre alsacien. La troupe « Geyderther Wackes » sera en représentation à la salle polyvalente de Geudertheim les 10, 11 et 12 janvier, ainsi qu’à la salle des fêtes de Hoerdt le 18 et 19 janvier.