L’autre jour, en apprenant votre mort Dinah, j’ai ressenti cette tristesse un peu spéciale qui nous traverse lorsque le ciel est sombre. Je ne vous ai jamais vue sur scène, mais j’aurais bien aimé. On m’a dit à quel point vous avez été toute votre longue vie une artiste. Vous n’étiez pas danseuse, comédienne ou chanteuse, mais tout cela à la fois. J’ai lu à quel point vous avez marqué la scène alsacienne, à quel point votre carrière est immense, à quel point vous êtes l’Alsace, l’Alsace ouverte sur les différences, à quel point avec votre cher époux vous avez marqué l’histoire des Alsaciens. Je me souviens d’avoir mesuré ma chance lorsque, par deux fois, je suis allé chez vous, dans votre appartement à Schiltigheim. Germain était mort depuis quelques années déjà.
Il y avait des tableaux et des photos partout. Vous m’aviez offert un café filtre. J’ai branché mon Nagra pour Radio France, nous avions parlé de votre vie, j’ai découvert la grandeur du Barabli. Quelle joie et quelle chance j’ai eues de vivre ce moment-là en tête à tête avec vous. Je suis venu une autre fois, pour préparer une émission que j’ai imaginée lorsque le maire Raphaël Nisand avait proposé de faire de vous une citoyenne d’honneur de la ville de Schiltigheim en 2012. Dans cette émission en public sur la chaîne locale, coanimée avec Sabryna Keller, nous avions invité André Bord, Christian Daniel, Sébastien Bizzotto, Jean-Pierre Schlagg et bien d’autres. Au départ, vous étiez réticente, c’était peut-être trop d’honneurs vous disiez, mais lors de l’enregistrement, les yeux de vos 20 ans ont pétillé, Dinah. Vous, la Berlinoise tombée amoureuse de l’Alsace, vous nous avez offert un joli moment de tendresse, de partage. Je vous ai sentie proche, et inaccessible aussi, comme le sont ceux qui ont vécu une vie si riche. Je n’oublie pas votre livre Une femme tout simplement (publié en 2004), ni votre espièglerie que je garde en moi comme des trésors, pour mes vieux jours.
Au revoir Madame.