lundi 8 septembre 2025
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Malek Boukerchi – Des histoires à courir

Ultra-marathonien de l’extrême, philo-conteur, anthropologue des résonances, Malek Boukerchi aime rappeler que la vie est une histoire de rencontres. Lors d’une conférence au Maroc, un jeune lui lance : « Pourquoi tu ne crées pas un groupe pour courir dans le désert ? ». Une graine est semée. En juillet 2022, privé de grandes traversées par le covid, il reprend le marathon, mais pas pour lui : pour des jeunes « cabossés par la vie », à qui il veut offrir une ascension, une espérance. Le premier défi ? Athènes, berceau légendaire du marathon. Aujourd’hui, avec l’association LES 42, il prépare 26 jeunes dont 7 Alsaciens à fouler les rues de New York. Plus qu’une course, un voyage initiatique où se mêlent discipline, fraternité et joie de vivre.

Maxi Flash : Comment est née l’idée de faire courir des jeunes au Marathon de New York ?

Malek Boukerchi : La vie, c’est un mélange de circonstances, de choix et de rencontres. L’association LES 42 est née de tout cela, au moment du covid, quand le monde – et le sport – se sont arrêtés. J’ai couru des marathons il y a trente ans, puis je suis parti vers les grandes traversées, à la recherche de rencontres et d’histoires. En 2022, j’ai décidé de reprendre le chemin du marathon, mais autrement. L’utiliser comme symbole d’espérance pour des jeunes en quête de repères. Pour leur offrir une ascension, une espérance. Le marathon, ce n’est pas seulement courir 42 km : c’est préparer le corps, mais surtout la tête.

Ces 26 jeunes ont entre 18 et 26 ans et viennent de toute la France – sept sont Alsaciens. Comment les avez-vous rencontrés et choisis ?

Ce sont des jeunes cabossés par le système, en situation de vulnérabilité, qui ont décroché ou eu des soucis plus graves. Certains aiment le sport, d’autres pas du tout. L’idée, c’était de mélanger les profils : ruralité et urbanité, France des couleurs et France des terroirs, filles et garçons. La Team Alsace, ce sont de belles énergies venues du nord de la région : Tina, Sophie, Lucas, Ismaël et Julien, encadrés par Gilles et Wahiba, nos coachs de cœur, ainsi que Thomas et Claude, Zohra, Eric, et Marie-Paul, Johanna, les mentors en action de running, sans qui l’aventure n’est pas possible.

La Team Alsace avec le mentor Eric. / ©DR
Vous n’êtes donc pas seul à les accompagner…

Non, nous sommes dix. Des coachs, mais aussi des mentors – souvent des chefs d’entreprise – qui financent le projet. Je me souviens qu’au début, certains me disaient « mais tu es fou de choisir ce jeune, il n’a pas les codes ».
Trois mois après, ils ont compris. Mieux, ils se sont mis à courir avec nous. À la fin, ils s’engagent même à proposer un emploi aux jeunes. C’est plus qu’un défi sportif, c’est un projet d’insertion, une communauté de destins. Certains jeunes de la première édition d’Athènes sont même devenus ambassadeurs, de véritables modèles pour les nouveaux. À toutes les belles énergies qui nous lisent et veulent nous aider : welcome, l’aventure ne fait que commencer !

Et après New York, quel héritage souhaitez-vous leur transmettre ?

La résilience. La confiance. L’idée que chaque blessure ouvre une nouvelle porte. Les 42 semaines d’entraînement sont déjà un marathon en soi : se lever chaque dimanche à 6h, courir, tenir. S’ils arrivent tous sur la ligne de départ, ils auront déjà gagné. Et s’ils franchissent la ligne d’arrivée avec une médaille, comme la Team Athènes, ce sera fabuleux !

La Team Athènes 2023. / ©DR
Résilience, fraternité, dépassement de soi… LES 42 dépasse largement le cadre du sport, pas vrai ?

Tout à fait. Le marathon, c’est la plus belle école de la vie. Pas de chrono, pas de compétition : juste finir la course, se faire plaisir, réapprendre à aimer son corps et à se faire confiance. Pour ces jeunes qui évoluent avec cette beauté factice des écrans, c’est déjà une sacrée victoire ! Courir, c’est aussi lutter contre la sédentarité. Et un tremplin professionnel : imaginez, à 20 ans, pouvoir dire à un recruteur qu’on a terminé le Marathon de New York… Cela prouve de la discipline, de l’audace, de la capacité à tenir dans la durée. Ce sont les qualités les plus remarquables dans la vie. Les compétences, ça peut toujours s’apprendre ensuite.

« C’est plus qu’un défi sportif, c’est un projet d’insertion, une communauté de destins »

Quelle place tient la notion de collectif dans cette aventure humaine ?

Vibrer ensemble, créer une harmonie relationnelle, c’est là toute la beauté de cette amitié marathonienne. En entraînement, ça chante, ça discute… Il y a une dimension psychologique très importante. On travaille l’estime de soi, on apprend la richesse de l’intergénérationnel… LES 42, c’est le plus grand marathon pour moi parce que je ne contrôle rien (rires) !

Vous qui avez couru aux quatre coins du monde, dites-nous : après quoi courez-vous encore ?

Je cours après nos humanités déchirées à retisser. Le monde a ses ombres, mais il est plein de lumière. Mon marathon à moi, c’est célébrer le Beau et le Bien : ce que j’appelle la « B-attitude ».

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