lundi 16 septembre 2024
AccueilChroniquesLes balades en couleur d'André MullerMarthe Kehren, la maraîchère amoureuse

Marthe Kehren, la maraîchère amoureuse

Fassne in élsässisch se dit, Fessenheim-le-Bas in Frànzèesch, c’est un village typiquement rural, qui a su garder l’âme paysanne avec une terre nourricière, fertile où l’on cultive depuis la nuit des temps du tabac : d’Düwàck dans ma langue maternelle. C’est aussi la capitale du pissenlit, des fraises et des asperges.

Tout pousse à foison dans ce beau jardin du Kochersberg le grenier à blé de l’Alsace, on dit bien en Alsacien « Risch wie a Kocherschbarjer Bùr », à vous de traduire ! Facile ! En voilà une belle destination Fassne, pour notre flânerie colorisée. Je vous promets chers Maxi-Läsers que notre balade sera instructive, cocasse, surprenante, pour notre rentrée de septembre. Vous avez préparé votre cahier à spirale, plumier, taillé vos crayons, nettoyé vos lunettes de vue, ça peut servir ! Aver sei vorsichtich ! Ne pas confondre avec son homonyme, l’autre Fessenheim célèbre pour sa production de lumière dans le 6/8… im Oöwerélsàss, où se trouve la plus ancienne centrale nucléaire, Jesses Gott, là je ne vous emmènerai jamais, Yo ! Il n’y a donc plus de danger Muller, le réacteur est à l’arrêt depuis quatre ans ! Zum gütt Glïck.

 

Me rendre à Fessenheim-le-Bas dans le 6/7… en bus

 

Je n’ai pas trop l’choix, ma Citroën C3 pluriel Charleston est chez le carrossier, une personne mal attentionnée l’a enlacée, plutôt embrassée l’arrière sans laisser d’adresse, je lui souhaite tout le bonheur du monde. Grrrrr ! Pfffff ! C’est la ligne 205 bus bleu qui m’emmène dans ce village champêtre. À la gare routière des Halles, le bus bleu est déjà stationné, j’accélère mes pas, je hèle le chauffeur assis sur son perchoir, au volant de son autobus, il a l’air si sérieux !

– Güete Morje, Herr Fàhrer, vous allez bien à Fessenheim-le-Bas, dans le Kochersbäri ?

– Oui M’sieur (avec un large sourire), j’vous reconnais, c’est vous le Maxi-Trotteur ?

– Euh ! ya ! ya ! Je peux monter, vous faites un tarif particulier pour les retraités ?

– Hop komm, komm, schnell mit Volgäs, je n’ai pas trop le temps de discuter, ça vous coûtera 3 euros et pas de réduction pour les Cotons-Tiges ! (Coton-Tige = cheveux blancs).

 

Il est sympa le chauffeur, très taquin !  En route Simone, ça démarre sur les chapeaux de roues. Oh ! trop chouette, j’adore me faire conduire, mirer les paysages, prendre son temps de vivre. Le ciel est d’un bleu azur, qui contraste avec de gros cumulus cotonneux de taille imposante qui ressemblent à des choux-fleurs, à des mamelons et même à des ailes d’ange. Je cligne des yeux, je joue avec la lumière, j’apprécie ce moment présent, délicieux. Je me réjouis de rencontrer Marthe, la maraîchère par tout temps, elle a les mains dans la terre, son cœur et sa tête dans les étoiles. Marthe est une paysanne, fille de paysan et fière de l’être, une jardinière passionnée qui transmet tout ce qu’elle a appris, jour après jour au contact de la terre et de la vie.

 

Le potager de Marthe, son nom : Red-weg. C’est une immense parcelle de plus de 3 hectares. Elle se trouve à l’extérieur de Fassne sur une petite route départementale, la D720, qu’emprunte le chauffeur de bus. Je me lève de mon siège, en chuchotant je lui demande de s’arrêter, je suis bien arrivé sur mon lieu de rendez-vous.

– Pardon Monsieur, je pourrais descendre ?

– Exceptionnellement ! Je connais bien Marthe la maraîchère, mais chutttt, ne le dites à personne sinon la compagnie me fera de gros ennuis.

– Soyez rassuré Monsieur, je sais garder un secret, merci pour cette belle balade en bus.

 

Un jardin extraordinaire

 

Vous connaissez la chanson de Trenet ? « C’est un jardin extraordinaire, il y a des tomates qui parlent l’alsacien, elles remuent leur derrière, en disant Vïelmols merci Marthelll ». On reconnaît très facilement Marthe avec son sourire et sa beauté ravageuse sur sa terre agricole, son galurin fleuri de fausses fleurs en plastique sur la tête, ses petites lunettes vertes sur le nez. Au loin, j’entends sa douce voix qui résonne et fait trembloter toute la parcelle de haricots grimpants !

 

– André komm, komm, je suis là, on cueille ce matin, les tomates ananas jaune, les noires de Crimée, elles sont mûres.

– Salut Marthe, je suis très content de te revoir !

– Tu sais André, je me nourris de ma terre natale, réputée parmi les plus fertiles d’Europe, cette terre de l’Ackerland, où les sols de lœss sont plus épais, plus productifs qu’ailleurs. J’ai tous les jours par tous les temps, les pieds et les mains dans cette terre argileuse, limoneuse, elle diffuse tellement d’énergie, c’est la raison de ma joie de vivre.

– Tes légumes dans ta nurserie : carottes, petits pois, tomates, patates douces, persil, échalotes, potirons sont un peu tes enfants que tu soignes, bichonnes ? Tu leur parles, les élèves avec amour jusqu’à maturation, chère maman ?

– Tu sais quand on aime on ne compte pas. Je récolte moi-même mes légumes, un par un. Je ne confie pas mes petits à n’importe qui, seulement ceux qui savent les apprécier. Un beau jour, Antoine Westermann, le chef triplement étoilé du Buerehiesel, est venu visiter mon jardin, il a goûté mes petits pois, ils étaient croquants, tendrement sucrés. Antoine m’a mis le pied à l’étrier et m’a permis de rentrer dans le monde de la grande gastronomie.

 

Depuis cette belle rencontre avec Antoine, une grande partie des restaurateurs sont tous amoureux des légumes bichonnés à l’ancienne de la maraîchère, jamais traités et surtout pas calibrés. Pourquoi les légumes de Marthe sont- ils exceptionnels ? Quels sont les secrets de son potager ? Un trésor est caché dans la terre de la maraîchère, comme dans la fable de Lafontaine Le laboureur et ses enfants, apprise à l’école primaire de l’Exen de Schiltigheim.

En saluant chaleureusement Marthe dans son jardin extraordinaire, elle me confie un autre secret très touchant en tenant ma main.

– Tu sais André, mon époux Christian est parti rejoindre les étoiles subitement, c’est un grand vide.

– Quelle grande tristesse chère Marthe, Christian était un gentleman-farmer, d’une élégance rare.

– André ! Regarde le ciel bleu, ce gros nuage blanc ressemble à des ailes d’ange, c’est Christian mon époux, il me fait un signe, je sens sa présence tous les jours au-dessus de mon jardin, il veille et prend soin de moi.

– Bien, ma chère Marthe, grosser Schmoutzzzz, je te souhaite le meilleur, merci pour ton accueil, ne change rien, tu es une maraîchère FOR-MI-DABLE.

 

À bientôt mes chers amis Maxi-Läser pour une nouvelle aventure dans un petit recoin de notre paradis alsacien. À plume !! Wasssss !!! À Fedder si tu préfères !

 

Le Maxi-Trotteur

André Muller

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