Comment résumer votre parcours en quelques mots ?
J’étais institutrice, j’ai exercé cinq années en Alsace, et j’ai fait sur un Master en psychologie clinique. J’ai vécu longtemps en Afrique, au Burundi, au Niger, en Namibie, au Bénin, en tout une quarantaine d’années, car mon mari était coopérant.
À quel moment avez-vous commencé à écrire ?
J’ai toujours beaucoup lu, j’ai toujours souhaité recevoir des livres pour Noël ou pour mes anniversaires. Je me suis mise à écrire à notre premier retour d’Afrique. Le besoin s’est fait sentir, je crois que je n’allais pas très bien à cette époque-là. C’est venu par accident. Je me suis souvenu d’une histoire, je l’ai écrite et je l’ai lue à ma sœur qui m’a encouragé à continuer. Elle m’a stimulé, c’est elle qui est à l’origine de ce livre. J’ai écrit sur la vie que je menais et qui n’était pas normale pour les gens d’ici. Cela remet beaucoup de choses en question.
Il y a un lien évident entre votre envie d’écrire et votre exil. Le fait de retrouver nos souvenirs de jeunesse était une manière de rester proche de vos racines ?
Oui. Quand je suis partie, j’avais vraiment envie de partir. Pour moi, même si j’ai toujours pensé y revenir, l’Alsace n’était pas vraiment utile. Mais une fois exilée, j’ai développé une certaine nostalgie pour l’Alsace, l’écriture m’a permis de mettre du baume sur cette nostalgie.
Votre ouvrage parle de vos souvenirs d’enfance, des années 50, tout cela en vous souvenant des odeurs. C’est très difficile d’écrire sur les odeurs !
Oui. Mais pour moi, les odeurs, c’est mon ancrage dans la mémoire. La mémoire olfactive, c’est le plus important. Ce sont les odeurs qui me rappellent des histoires, des tas de choses que j’ai vécues.
Et votre mémoire olfactive est particulièrement développée ?
Oui, comme mon sens de l’odorat. C’est difficile à expliquer. Il y a beaucoup de nostalgie là-dedans. Par exemple la cannelle : cette odeur existe dans le monde entier, mais elle n’a pas la même odeur en Afrique qu’en Alsace. Ici, la cannelle c’est Noël, c’est plein de choses.
Il y avait d’autres odeurs qui vous rappelaient l’Alsace ?
Oui, l’odeur des sapins. Quand il commence à pleuvoir, ça vous ramène tout de suite chez vous. Je me baigne dans les odeurs de l’Alsace, je les favorise partout chez moi, peut-être parce qu’elles m’ont manqué longtemps, j’en ai vraiment besoin. Je fais des bredele chaque année alors que je suis seul. Ma maison continue à vivre avec ces odeurs-là.
Ce sont vos madeleines de Proust ?
Tout à fait. Cela garde mon enfance très vivante. J’avais promis ce livre depuis longtemps, voilà c’est fait. C’est une satisfaction. C’est une nouvelle étape, c’est excitant, car les gens vous mettent dans la catégorie des retraités et vous devez faire des choses comme les retraités, mais moi je n’ai pas envie de ça. Maintenant que j’ai commencé à écrire, c’est comme si j’avais ouvert une boîte, j’ai besoin de continuer et j’espère avoir le temps, j’ai des idées qui commencent à se mettre en place.