Comment oublier Over the Rainbow qui avait été une lecture qui serre le cœur et fait couler les larmes ? Avec Reverdir, Constance Joly revient explorer les zones sensibles de l’existence, cette fois du côté des femmes qui, arrivées à la cinquantaine, voient le monde tanguer. Et, comme toujours avec elle, c’est d’une incroyable justesse.
Elle nous parle d’une femme au tournant de sa vie, d’une mère qui s’efface lentement dans le brouillard de la maladie d’Alzheimer, d’une fille qui s’émancipe, pleine de vie et d’amour et d’un mari, compagnon de longue date, qu’elle choisit de quitter. Et cette question, que beaucoup de femmes se posent à cet âge : que reste-t-il de moi, une fois les rôles épuisés ? Comment redessiner les contours de son désir, de son identité, de sa liberté ? Constance Joly a ce don rare : celui d’écrire sans effets, mais avec une grâce évidente. Elle capte les hésitations, les élans, les renoncements, avec une délicatesse infinie. L’écriture fine, organique, empreinte de métaphores végétales qui tissent un fil souterrain tout au long du texte, murmure avec élégance, la possibilité d’autres voies. Elle nous tend un miroir doux, dans lequel on se reconnaît – dans le doute, dans l’envie d’ailleurs, dans la peur de décevoir, mais aussi dans cette force souterraine qui nous pousse à avancer, même cabossées.
Ce roman n’est pas seulement celui d’une chute, mais d’un recommencement discret. Quand tout chancelle, quelque chose insiste à pousser. Un faisan empaillé, deux autrices aux yeux clairs, une amitié tenace au milieu du désordre : autant de signes fragiles mais tenaces d’une vie qui se réinvente. Entre corps qui se transforment et liens qui se déplacent, c’est surtout une histoire de ce qui renaît — même quand on croit que tout s’est tu. On ressort de Reverdir ému par cette femme qui vacille et se relève. Qui tombe amoureuse à nouveau, trébuche, se blesse, mais apprend, enfin, à écouter ce qui vibre en elle. À se choisir.
Constance Joly, une fois encore, touche en plein cœur. Et nous rappelle que le plus grand acte de rébellion – ou de tendresse – passé 50 ans, c’est peut-être simplement de s’autoriser à fleurir autrement.