Raphaël, 48 ans, traverse une période sombre. Sa femme l’a quitté après vingt ans de vie commune. Leur fille est partie vivre sa vie. Lui ne dort plus, n’écrit plus, mange à peine. Il a même séjourné quelques semaines en clinique. Un arrêt forcé pour ne pas sombrer. Alors il part. Il prend la route avec un sac, des livres, quelques carnets. Et la mer comme seule boussole. Non pas pour s’aérer, mais pour espérer que l’air salé desserre un peu l’étau. Il ne cherche pas à aller mieux. Il cherche un lieu où sa douleur puisse exister sans l’écraser. De La Grande-Motte à Préfailles, en passant par Arcachon ou Bénerville, il suit les bords de mer en dehors de la saison. Ces stations balnéaires, désertées, deviennent les reflets de son état intérieur : mouvant, instable, fragile. Rien ne tient vraiment. Ni la lumière, ni le sable, ni lui. Ces paysages instables sont le reflet de son état intérieur, une géographie de la dérive.
Sur la route, quelques visages apparaissent : Mona, une retraitée au franc-parler tendre, Loïs, un adolescent paumé et lumineux, Ellen, qui fait renaître un peu de désir. Ces rencontres ne sauvent pas, mais elles le relient à la vie. Juste assez pour qu’il s’accroche de nouveau au réel. Et puis vient Préfailles, la dernière étape. La maison de ses parents, qu’il n’a jamais osé rouvrir depuis leur mort. Il doit trier, classer, vendre. Fermer une porte pour, peut-être, en ouvrir une autre. Un petit geste, mais une bascule décisive : accepter de laisser derrière soi pour pouvoir avancer autrement.
Arnaud Cathrine signe un roman tout en nuances, construit comme une suite de fragments. Il capte avec justesse le moment suspendu entre l’effondrement et la reprise. Son écriture est pudique, délicate, sensible. Sans pathos, mais avec une grande humanité. Un beau texte sur la perte, le vide, et ces petits déplacements qui permettent, un jour, de recommencer. Pas comme avant, mais autrement.