Quand elle accompagnait sa grand-mère acheter du poisson à l’arrivée des bateaux, quand elle est retournée au Vietnam visiter son grand-père ou quand elle mangeait aux échoppes de rue : c’est une cuisine des souvenirs que propose Irène. « Les nems nuong, c’est le plat signature d’iNha Trang, avance-t-elle. C’est une brochette roulée dans une galette de riz avec de la salade, du concombre et des herbes. J’aimerais partager ce plat que j’ai mangé avec mon grand-père ; jusqu’à présent, je ne l’ai pas trouvé dans les restaurants. C’est la recette de ma mère qui a grandi là-bas. »
Irène, elle, est arrivée à 9 ans en France, « dans le froid du printemps parisien ».
Cinq ans auparavant, son père avait fui un patron qui l’avait emmené aux Philippines enfermé dans la cale de son bateau. Après avoir travaillé en usine à Besançon, il arrive en Alsace et fait venir sa femme et ses cinq enfants à Strasbourg en 1992. « On ne savait pas parler, on ne comprenait pas ce qu’on faisait là, se rappelle Irène. Pour moi, c’était vraiment dur. J’ai fait des études en bac pro Métiers de la mode, mais comme c’était trop difficile, j’ai cherché du travail dans la restauration ». Puis elle se lance avec iNha Trang en juillet 2024 sur le marché de Weyersheim, où son mari tient un garage auto.

Une simple table favorise les échanges avec les villageois. / ©DR
Banh xeo et cha la lot
Et parce que ce village lui rappelle des souvenirs—« c’est comme une famille, tous les samedis les gens se rencontrent au marché et discutent ! »—, Irène essaie de faire découvrir la véritable cuisine vietnamienne à ses clients, avec une simple table pour éviter l’obstacle de la vitrine. « Souvent les villageois ne connaissent que les nems et les rouleaux de printemps…
Mais il y a aussi les banh xeo, c’est comme une crêpe avec des fruits de mer, crevettes, soja, sauce un peu piquante, ça sent très bon ; les brioches vapeur banh bao ; ou les cha la lot, c’est croustillant, pour l’apéro, ils aiment bien ! » Reste qu’Irène veut faire plaisir, alors quand elle propose le plat typique com suon—com signifie riz—parfois il devient « nouilles suon, rit-elle. Les clients veulent toujours des nouilles, alors que le riz absorbe la sauce nuoc mam… Je ne comprends pas, mais je suis à leur écoute ! » Tant et si bien qu’il vaut mieux arriver tôt le samedi matin !


