Une haie d’honneur ainsi qu’un panier géant, tous deux faits d’osier bourgeonnant, mènent au jardin couvé par Laurent Waeffler dans le ried hœrdtois. « Ce sont des saules, ils reprennent tous les ans, explique-t-il. Il suffit de les planter à 50 cm de profondeur, taillés en biseau, pour que les racines poussent. Ici, on est en zone humide, la nappe phréatique est à moins d’un mètre. » C’est bien ce qui fait la particularité de cette terre noire, très riche en matière organique, reliquat du Rhin quaternaire.
« C’était une roselière, un marais », poursuit le président.
Faucher à la main comme grand-père
En 2019, avec « six copains qui aiment la nature et jardiner » mais n’ont pas forcément la place chez eux, Laurent, cadre à la LPO, monte l’AJVR : « Mutualiser, montrer nos idées pour protéger la biodiversité du ried et les savoir-faire anciens ». Quand il veut faire appel à un berger et ses moutons ou alors fauche la prairie à la main, Laurent pense à son grand-père, qu’il a vu faire. « Nous avons des règles déontologiques fixées dans nos statuts. Par exemple, pas de produits chimiques ou pas de graines sélectionnées, elles ne viennent pas de la grande distribution. Ce sont des fonds de jardins ou des graines de la saison précédente ».
Comme la fraise blanche, la livèche (le Maggi), le millepertuis ou encore l’ail des ours. Ici, pas de mauvaises herbes, ce sont « des adventices. Le pissenlit est récupéré, soit pour la salade, soit pour les lapins ». Et comme tout cycle de la nature, les lapins fourniront le fumier, avec la cendre de la cheminée et le compost. Chacun apporte sa contribution, une quinzaine de membres travaille régulièrement au potager ; en 2021, ce sont 97 adhérents qui soutenaient les actions d’AJVR. « Plus on sera nombreux, plus on aura de
poids », estime le président. Face aux gros agriculteurs notamment, qui remplacent le maraîchage par des cultures intensives et laissent « une terre à bout ».
Une méthode tombée dans l’oubli
Pourtant, « en ne luttant pas contre la nature, mais en travaillant avec », l’homme y gagne. Les auxiliaires utiles reviennent, comme le hérisson qui mangent les limaces, les oiseaux aussi dans le verger haute-tige, une méthode tombée dans l’oubli. « Le nombre d’orthoptères a triplé et j’ai compté 20 nids de rats des moissons dans les hautes herbes », sourit Laurent. Il espère faire revenir aussi la chouette chevêche dans les cavités des saules-têtards… Depuis la cabane faite de palettes de récupération, ce sera l’occasion pour les enfants du village d’observer la faune de nos campagnes.