Quand avez-vous démarré la photo ?
Sarah Luise Breitling : La photo ne m’intéressait absolument pas dans l’enfance. Je n’ai jamais pris de cours, je n’avais aucune notion, même pas d’appareil photo, mais j’ai été appelée, je pense par ma sœur. J’ai perdu ma jumelle à 21 ans en 2010, et je n’ai toujours pas fait mon deuil. Elle a eu un accident de voiture. On se ressemblait physiquement, on vivait ensemble, on étudiait ensemble, un vrai couple de jumeaux ! J’ai eu un flash en 2016 comme si je devais faire de la photo. J’ai démissionné de mon poste d’assistante de direction et je m’y suis mise. Je fais de la photo numérique, argentique et je développe mes propres films dans un labo à Entzheim, sans jamais avoir appris, c’est bizarre non ?
Vous vous auto-photo-graphiez, qu’est-ce que cela signifie pour vous ?
J’ai l’impression que je vieillis avec ma sœur, comme si ce n’était pas moi la personne que je photographie. Je ne me suis jamais reconstruite, et la photo ça m’aide. Je me donne tout ce qui me manque, un manque d’amour, un vide énorme, et c’est juste un instant pour le combler.
Les autoportraits de Sarah apportent du « beau » apaisant et esthétique.
©Sarah Luise Breitling
Cherchez-vous aussi la renommée avec vos photos ?
J’aimerais que mes photos soient vues et revues par le plus grand nombre, ça ferait du bien, parce que ça apaiserait, les gens sont en manque de beau. Je n’en publie pas trop sur les réseaux, parce que ça m’embête d’être censurée pour un téton alors que ce n’est ni érotique ni porno. Mais j’ai pas mal de photos que je garde pour une expo ou un livre… Je suis assez discrète, ce sont plutôt les photos qui parlent de moi. Les autoportraits, j’en ferai toute ma vie. Il faut retenir cette femme tellement élégante, comme une histoire passée.
Comment définiriez-vous votre style ?
Très sobre, artistique et pro-fessionnel. Les autoportraits, c’est la photo par excellence dans le sens où ça a encore du cachet—sans parler de moi : il y a du beau comme dans les années 30. On est plutôt dans l’ère de la décadence, où l’humain doit être mal habillé, avoir les cheveux rouges et être tatoué. Chez moi, c’est plutôt du doux et de la féminité. Je préfère le noir et blanc, il est plus authentique, plus intemporel, il me raconte une histoire, il me touche. Par moments, c’est comme si je n’étais pas dans la bonne époque…
www.sarahbreitling.com et sarahluise-breitling.tumblr.com