mardi 22 avril 2025
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Rue des Potiers à Betschdorf

La route des potiers, petite sœur de la route du vin ?

Mais oui : nos ancêtres aimaient travailler la terre autant que la vigne… et depuis encore plus longtemps ! On peut en effet admirer, au musée de Haguenau, des tessons de récipients en terre cuite datant de l’âge de bronze.

Briques, tuiles, carreaux et poteries domestiques ont ainsi été, tout au long de notre histoire, fabriqués par ici plus encore que dans le reste de l’Alsace. Betschdorf s’est imposé, au fil du temps, comme l’un des lieux les plus emblématiques en la matière : en 1865, 60 poteries y employaient 400 personnes ! (Même si en 1865, la commune n’existait pas à proprement parler : ce n’est qu’en 1971 que les villages d’Oberbetschdorf et de Niederbetschdorf ont eu la très logique idée de s’assembler.) Avant le départ, je me lance – comme toujours – dans un petit repérage. Sur les photos consultées, des maisons à colombages plus jolies les unes que les autres me font immédiatement de l’œil. Il me semble apercevoir, sur le toit de l’une d’elles, la délicieuse silhouette d’un putto.

©documents remis
Un putto, kesako ?

Les putti sont d’adorables chérubins bouclés, joufflus et dodus, généralement dotés d’une chouette paire d’ailes dans le dos. Descendants des petits « amours »
romains qui accompagnaient Mars et Vénus, on les adorait à l’époque de la Renaissance. Aujourd’hui, certains les trouvent totalement ringards, mais moi, séquelle des cahiers de poésie des copines de mon enfance, j’assume sans complexe mon gros faible pour eux.

En route, donc ! J’ai rendez-vous avec un ange.

La journée est printanière, le ciel tout bleu, l’air tout doux. À peine arrivée, belle explosion de couleurs. J’admire les magnolias en fleurs, les forsythias jaune vif, salue quelques délicats cognassiers du Japon, m’amuse de la ronde des pâquerettes, absolument omniprésentes.

©documents remis

Ma principale destination est la bien nommée rue des Potiers. En amont, la perspective de la voie est digne d’une carte postale. C’est donc là que les artisans réalisent, parfois depuis des générations, leurs ouvrages en grès au sel ! Je savais bien sûr que leurs poteries étaient traditionnellement grises, décorées de bleu de cobalt et vitrifiées à haute température. Mais j’ai appris qu’ici, on parlait de 1 300C° (à côté, le lait UHT fait figure de petit joueur).

De la poterie, il y en a partout : en jardinières, en carreaux décoratifs, déclinée en bouton de porte ou en numéro d’adresse sur les murs de maisons, en cruches ou en pots alignés en déco sur le bord d’une fenêtre ou une poutre extérieure. Partout, oui, à telle enseigne que soudain, je m’immobilise : qu’est-ce que c’est cette rambarde de balcon, où le garde-fou est soutenu par une rangée de vases tout gris ? Quoi ? Pas la moindre tache bleue dessus ? En m’approchant, je réalise qu’il s’agit d’éléments… en bois, peints en gris, tout simplement ; au temps pour moi.

©documents remis

J’arpente la voie jusqu’au bout, yeux grands ouverts, repérant quelques belles vitrines, scrutant les toits de tuiles à la recherche du séraphin. Il se cache, le loustic. Au bout de la rue, demi-tour, camarade, on recommence, mais dans l’autre sens et sur le trottoir d’en face.

Je continue de découvrir des pièces s’affranchissant beaucoup du décor traditionnel. Des couleurs, des formes inattendues. Sujets décoratifs, objets utilitaires au design très actuel… Chemin faisant, j’observe toujours les toits. Tiens, un coq, ici… Il a des ailes, oui, mais c’est bien tout ce qu’il a de commun avec un putto. Là-bas, peut-être ?
Ah, non, ce coup-ci, c’est une petite sorcière.

©documents remis

Mon petit ange a bel et bien disparu, ou peut-être l’ai-je rêvé… quoi qu’il en soit, j’ai bien l’impression que la sorcière me fait un clin d’œil. Je crois l’entendre me demander si je sais comment on dit potier, en anglais. Facile : c’est potter !

Je n’ai pas perdu au change : je cherchais un petit amour, peut-être croiserai-je bientôt sur ma route un sorcier avec une drôle de cicatrice en forme d’éclair sur le front, ou peut-être même un alchimiste.

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