Nous avons eu un véritable coup de cœur », confient-ils. « Nos clients comparaient souvent notre terrasse à celle-ci. Un signe. » Dans cette maison datant de 1860, tout a été repensé pour une ambiance douce et confortable : deux salles, une cave à vins, une alcôve banquette, un salon à l’étage avec vue sur l’eau, et une terrasse verdoyante, limitée à dix tables pour conserver l’intimité. Le mobilier a été choisi ou réutilisé pour assurer la continuité esthétique. La cuisine reste fidèle à l’identité de la maison : saisonnière, savoureuse, généreuse. Seules nouveautés : le retour du chariot de fromages et une cave de 1 000 bouteilles, visible depuis la salle.
L’équipe demeure la même, autour de Guillaume Scheer, qui officie désormais dans une cuisine plus vaste et mieux équipée. Elle a été réaménagée (carrelage, fours, climatisation et un espace pâtisserie dédié). « On conserve nos menus et nos prix »,
précise-t-il. Le midi, le menu affaire reste à 54 €, proposé du mercredi au vendredi. Le soir, deux propositions : le menu Plaisirs en cinq plats (120 €) ou la version Gourmands en six (145 €). Avec un fil rouge : les sauces, car pour Guillaume Scheer, rien, ou presque, n’est plus important que les sauces, toujours servies généreusement. Quelques jours avant ce déménagement, le couple a ouvert un second établissement dans leur ancienne adresse à Schiltigheim : Gourmand Bistrot. À l’ardoise, des plats rustiques et généreux, faits maison. En cuisine, Flavien Testart, fidèle bras droit de Guillaume depuis sept ans, formé chez Olivier Nasti. En salle, Anthony Longour, issu d’une famille de restaurateurs de la Creuse, arrivé il y a trois ans, en assure désormais la direction.
Des jus et des sauces de précision
Guillaume Scheer a toujours été animé par la passion. Il commence au lycée hôtelier de Strasbourg, puis affine son style à L’Étrier du Royal Barrière à Deauville et au Pavillon Ledoyen*** auprès de Christian Le Squer. Attaché à l’Alsace, il revient à Strasbourg pour l’ouverture de Flamme & Co avec Olivier Nasti, puis signe la carte du 1741, décrochant une étoile Michelin. En 2018, il ouvre Les Plaisirs Gourmands à Schiltigheim avec Charlotte, son épouse, rencontrée à Deauville. Ils obtiennent l’étoile en 2021.
La carte affiche une identité précise. Dès les amuse-bouches, l’Alsace s’exprime avec un cannelé garni d’escargots et champignons et une tarte flambée soufflée. Le tartare de tomate surmonté d’une mousse mozzarella est réveillé par un sorbet jalapeño. La tartelette de foie gras, rhubarbe et tuile parmesan s’accompagne d’une brioche tiède. Le bar mariné au leche de tigre coco-citron vert vibre en bouche. La raviole d’oignons et ris de veau grillé, plongée dans une soupe à l’oignon et sauce au vin jaune, illustre l’importance des jus dans la construction des plats.
Viennent ensuite un Saint-Pierre juste raidi, artichauts en textures et barigoule tomate-basilic, un homard en risotto, émulsion de crustacés, accompagné d’un barbajuan de pinces. Le pigeonneau, dont la cuisse est travaillée en samoussa, s’accompagne d’aubergine confite et d’un jus aux épices ; le filet de bœuf charolais est servi avec petits pois à la marjolaine, morilles, pommes de terre soufflées et sauce ciboulette. Les sauces sont exécutées avec précision, valorisées par un service en salle élégant et maîtrisé.
Pour conclure, une crème brûlée à la lavande et glace au lait ribot, suivie de fraises, framboises et basilic. Une cuisine de précision, élégante et lisible, qui signe l’univers des Plaisirs Gourmands.
Sandrine KAUFFER
