lundi 14 juillet 2025
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Lise Bonnet – La force intérieure

À seulement 27 ans, Lise Bonnet force l’admiration. La jeune femme, atteinte d’un handicap invisible, a su transformer l’adversité en force. Pâtissière-chocolatière de formation, Lise est aussi une grande sportive, et ce depuis l’enfance. D’abord championne de plongeon, la jeune haguenovienne s’est tournée vers le i-karaté, une pratique inclusive de l’art martial japonais. Comme elle ne fait jamais les choses à moitié, Lise a déjà remporté plusieurs titres mondiaux !

Maxi Flash : Vous êtes née à Abidjan, vous avez commencé votre vie sur le continent africain. Vous vous en souvenez ?

Lise Bonnet : Absolument pas (rires). Mon père était militaire de carrière. Il était missionné en long séjour en Côte d’Ivoire. Ainsi, je suis née là-bas, le jour de l’an ! Mais je n’ai que la nationalité française. Nous n’avons vécu que deux ans sur place. Mon père a finalement été affecté au camp d’Oberhoffen-sur-Moder, où il a terminé sa carrière et où nous sommes installés en famille.

Vous me disiez avoir un handicap invisible. De quoi êtes-vous atteinte ?

J’ai un TDA, un trouble de l’attention et je suis multidys sévère : dysorthographique, dyslexique, dysphasique, dyscalculique, etc. Il me faut plus de temps que la normale pour assimiler ce que l’on me dit ou ce que l’on me demande. Une fois que je suis adaptée, tout va bien. Attention, je n’ai pas de déficience mentale. J’ai une RQTH, une reconnaissance en qualité de travailleur handicapé, reconnue par la MDPH. Ça ne m’a pas empêché de travailler et de pratiquer mon sport. La pédagogie doit simplement être adaptée.

Le sport, parlons-en ! Dans votre parcours, il vous a été difficile d’en choisir un en particulier, n’est-ce pas ?

Je suis née dans une famille sportive. Ma mère pratiquait le patinage artistique en compétition. Mon père, quant à lui, était à l’armée : le sport était dans son quotidien. Mes parents n’ont jamais accepté que leurs enfants restent à la maison à ne rien faire. Toute petite en Côte d’Ivoire, âgée de quelques mois seulement, mon père m’emmenait à la piscine pour des séances de bébé nageur. Ensuite, j’ai multiplié des centaines d’heures d’initiations et d’entraînements à de multiples sports : baby gym, natation à Nautiland, danse africaine ou classique, etc. L’objectif était de trouver ce qui me correspondait le mieux. Il pouvait m’arriver de dépasser les 17 heures d’activités extrascolaires en une semaine ! J’étais très demandeuse. J’étais hyperactive.

L’athlète haguenovienne espère bien ajouter de nouvelles breloques à sa collection. / ©Dr
Durant votre enfance, un premier sport a retenu votre attention : le plongeon. Comment l’avez-vous découvert ?

J’avais 6 ans et j’étais à la piscine avec ma mère. J’ai flashé dessus et je me suis tout de suite inscrite. J’ai rapidement débuté la compétition, d’abord au niveau départemental, puis au régional. J’ai remporté plusieurs titres régionaux. J’ai continué jusqu’à mes 12 ans. La réfection de la piscine de Schiltigheim a mis un coup d’arrêt à ma pratique du plongeon. J’ai mis le sport entre parenthèses et je me suis tournée vers le théâtre pendant un temps.

Vous avez repris le sport très rapidement et vous avez découvert le i-karaté. Ça a changé votre vie ?

Après quelques mois sans activité physique, j’étais demandeuse de reprendre. Un jour, j’ai accompagné ma sœur, Léa, à une session de i-karaté. J’avais 13 ans, c’était en 2011. J’ai beaucoup apprécié cette première approche, j’ai décidé de m’y inscrire et ça a changé ma vie. J’ai progressé très rapidement et les ceintures se sont enchaînées. Durant presque dix ans, notre mère faisait près de trois allers-retours par semaine entre Haguenau et Châtenois, où je m’entraînais à l’époque. Je participais aux séances adaptées, mais aussi aux séances avec les valides.

Vous avez atteint le haut niveau. À quoi ressemble votre quotidien de sportive ?

Tous les samedis matin, je m’entraîne à l’ARAME de Strasbourg avec ma coach Myriam Wischlen-Millasseau, du réseau Jehm le sport, mais aussi avec les autres membres de l’équipe de France de i-karaté. Dans cette structure, la pédagogie et le matériel sont adaptés. À côté, je suis aussi licenciée au KASE (Karaté Sport Élite) de Brumath, où je suis entraînée par Gilles Ihle une à deux fois par semaine, notamment pour travailler mon cardio et mon combat. Je m’entraîne dès que je peux, en fonction de mon activité professionnelle et de mes disponibilités.

Lise et Thierry Kentzinger, deux Alsaciens du Nord champions du monde de i-karaté, en 2019. / ©Dr
À travers vos années de pratique, vous avez remporté plusieurs titres. Pour vous, quel a été le plus beau ?

J’ai remporté trois titres mondiaux. Le premier à Anvers en 2016, mais la compétition qui m’a le plus marqué était en Irlande en 2019, juste avant l’épidémie de covid. J’ai terminé troisième en kata, deuxième en attaque défense et championne du monde en kata par équipe. En plus de la victoire, j’ai pu découvrir un très beau pays, avec des habitants accueillants et chaleureux.

En mai dernier, vous avez à nouveau brillé lors des Championnats du monde de i-karaté à Lund (Suède). Trois médailles, toutes en or !

Effectivement, c’était une magnifique performance. Pourtant, rien n’était gagné d’avance. J’ai eu de gros problèmes de santé. Il y a un an, j’ai subi une chirurgie bariatrique. J’avais pris beaucoup de poids, j’ai tout perdu très rapidement. Ensuite, trois mois avant la compétition, j’ai eu une rupture et un déchirement de la rétine, j’ai dû être opérée en urgence. L’ophtalmologue voulait même que j’arrête le karaté, mais c’était impossible pour moi. Je suis partie avec Myriam et l’équipe de France en me disant que je ferais de mon mieux.

À quoi s’attendre pour les prochains mois ?

Des championnats du monde seront bientôt annoncés. Des étapes internationales auront lieu en Belgique avant, pour préparer les mondiaux. Je vais aussi préparer mon passage de ceinture noire deuxième dan. En plus de m’entraîner et de participer à des compétitions, j’apprends aussi à encadrer et à transmettre mon sport. Je viens de me former pour devenir assistante d’entraîneur. Je dois conjuguer mon sport avec ma vie quotidienne, et notamment mon emploi chez le chocolatier Jacques Bockel, à Saverne.

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