Lorsque ses voisins de Marienthal invitent Samuel à récupérer des outils en décembre 2022, Jeanne se met à parler de la guerre. Il se dit « une personne a vécu ce que moi j’étudie en histoire ! Elle est de 36, son mari aussi. Je les ai enregistrés. Au début, j’ai juste récolté, puis tapé le texte à l’ordinateur ». Sans savoir exactement où il va, Samuel se rend compte que « les premiers témoignages sont rangés comme si je voulais illustrer la guerre par une étude personnelle ». Lui qui a « toujours aimé vérifier les choses, regarder d’où ça vient, les dates… » ne veut pas s’en tenir au programme scolaire. Le jeune homme a aussi eu la chance de connaître son arrière-grand-mère : « Je l’aimais beaucoup parce qu’elle me racontait des petites histoires aux repas de famille. Par la suite, j’ai fait le lien avec la guerre ».
à Lyon. / ©Dr
34 témoignages
Puis ses recherches internet et « le bouche-à-oreille » le mènent à « Marthe, de Haguenau, née en 1928, une connaissance de mes grands-parents ». De Lyon à Metz jusqu’en Suisse, son père le conduit jusqu’à obtenir 34 témoignages, de la plus âgée–106 ans en février !– à son grand-oncle, né en 1940. « J’aime beaucoup la relation avec les personnes âgées, je m’y attache, c’est important », précise le jeune homme. Une des histoires qui l’a le plus touché est « commune à plusieurs, ce sont les Malgré-nous. Ce qui extrêmement choquant, c’est qu’on doit combattre du côté des Allemands alors qu’on est français ».
Ce fut le cas de Hugues, qui habite Strasbourg. Né en 1927, « c’est un ancien prof de philosophie, il sait mettre les mots, il est très précis ». Samuel suit le fil dans son manuscrit : « En 33, il perd sa maman, en 39, il est en 5e quand la guerre est déclarée. En 43, il rentre en 3e et là l’incorporation de force commence. Ils sont en classe, et des soldats allemands emmènent 28 jeunes hommes au conseil de révision. Hugues part en train, fait le RAD et une petite formation militaire dans des baraques. Ensuite il part à la guerre ». Au même âge qu’Hugues à l’époque, Samuel réfléchit : « Je viens d’avoir un bac blanc, mais ça ne veut rien dire, parce que lui aussi est passé de l’élève normal qui rend un devoir de latin à un jeune soldat en trois mois… » Dans ce monde un peu instable, il se destine au métier d’enseignant pour « transmettre ce que les personnes âgées [lui] ont dit ». Prochaine étape : finaliser le livre avec la bourse obtenue pour le faire éditer.
