« Ici, les gens comme vous sont obligés de relâcher la pression », me lance la responsable des lieux à mon arrivée. Mince, elle nous a démasqués mon TDA hyperactif et moi, je suis une pile électrique surchargée, mais en même temps, je sors tout juste du bureau et sur la route, dans la nuit noire, j’ai évité de justesse un frontal entre « une grosse bête » (un chevreuil) et mon carrosse ! On est un peu perdus ici, mais j’ai encore trois barres de réseau et la 3G… « Il n’y a pas de Wifi, c’est voulu par la maison ». Comment? Je dissimule l’accro aux réseaux en moi qui sent déjà le redouté parfum de la désintox. J’avais prévu de « télétravailler », mais ils n’auront qu’à le justifier à mes patrons non ? Adieu mon forfait, vive le partage de données !
« Voici des allume-feu, des allumettes et la lampe à huile. Il y a un local à bois sur le chemin ». Me serais-je trompée d’adresse, la soirée cosy ce n’est pas ici ? J’ai
dû tomber dans un stage survivaliste ! Mais même pas peur ! Alors, avec mon compagnon et trois collègues (j’ai partagé, plus on est de fous…), on s’oriente vers le n°15, qui peut accueillir jusqu’à six personnes, à la lumière de nos téléphones.
Le vent souffle sur les plaines – j’espère que vous avez la réf – mais au loin je discerne notre cabane, elle est mignonne avec sa guirlande qui s’agite à l’entrée. Vite, au chaud, je me jette tête la première à l’intérieur et là, surprise, il fait 6°, à peine plus que dehors. C’était peut-être pour ça le bois ? Après quelques secondes le regard perdu dans le vide, l’homo erectus en moi prend le dessus, personne ne finira congelé sous ma responsabilité ! Je cours au bois avec une cagette, fais le plein, reviens – en glissant sur la glace, pensée pour mon coccyx – amorce un feu, allume le réchaud avec mes précieuses allumettes, lance la cuisson des patates et démarre la machine à raclette -faudrait pas se laisser mourir de faim- pour nourrir la tribu tout en réchauffant notre petit igloo boisé. Il fait déjà meilleur, la pièce de vie, éclairée par une guirlande et la lampe à huile, est tout de suite plus sympathique. C’est sommaire, mais coquet, et ça correspond à l’esprit vanté sur le site. Nous mangeons goulûment, finissons les dernières bières, pas de télé à regarder et avec toutes ces péripéties, l’heure du dodo est déjà là, direction l’espace nuit !
Il est composé de couchettes superposées en version améliorée, la première, à même le sol, est un lit clos par des rideaux dans lequel mon collègue journaliste et son amie disparaissent. Au-dessus, un plancher, accessible par une petite échelle en bois, avec un grand matelas, je saute dans mes quartiers et me fais piétiner par notre graphiste qui va dormir un étage plus haut, dans le renfoncement du toit. Bercée par le silence – en omettant les ronflements – je m’abandonne aux bras de Morphée (et de mon amoureux, transi de froid), jusqu’au pipi nocturne d’un de nos voisins de chambrée qui a osé tirer la chasse et qui ne s’est toujours pas dénoncé ! Tout vit dans la bicoque, elle bouge au gré du vent, des pas de ceux qui s’y meuvent et… de la chasse d’eau !
7h30, le réveil sonne, le foyer s’est éteint, ça caille, alors j’enfile ma tenue de combat et vais chercher du bois puis regarde un tutoriel sur YouTube pour faire du café dans une machine à l’italienne, ma découverte du séjour, à ne retirer du feu que quand ça a fait «glouglou» d’après la vidéo ! Les autres m’ont dit que ma tisane caféinée était buvable, n’en consommant jamais, je les ai crus sur parole. Il est déjà l’heure pour les autres de retourner à la rédaction, mais pour ma part j’ai bien l’intention de profiter encore un peu, en amoureux cette fois, d’une nuitée supplémentaire pour la Saint-Valentin.
Randonnée, goûter, soirée plaid, bouquin… Ces souvenirs-là, je les garde bien égoïstement
pour moi !