Depuis octobre 2020, trente démarches supplémentaires (dont l’inscription au collège et au lycée, ou les demandes de procuration de vote) sont désormais réalisables par Internet. Il en reste encore 38 à « numériser » pour atteindre l’objectif des 250 démarches administratives accessibles en ligne promises par Emmanuel Macron lors de sa campagne présidentielle. Seulement, si « accessibles en ligne » ne veut pas forcément dire « accessible uniquement en ligne », beaucoup craignent que ce virage laisse sur le bas-côté certains publics pour qui l’outil informatique s’avère davantage une contrainte qu’un allié.
L’illectronisme, grand ennemi du numérique
Pour Henriette Steinberg, outre les bouleversements que de tels changements supposent (comme la suppression de milliers de postes de fonctionnaires et la transformation du rôle des conseillers), cette tendance vers la dématérialisation de l’administration se confronte à un autre enjeu : celui de l’illectronisme, c’est-à-dire de l’analphabétisme numérique. Dans le lot concerné, on retrouve majoritaire-ment des seniors, des personnes pauvres, des chômeurs longue durée, mais aussi, de manière plus surprenante, des jeunes de moins de 35 ans issus des quartiers populaires. L’État veut former 1,5 million de personnes par an.
Une « marche forcée » trop rapide ?
Sur France 2, la secrétaire générale du Secours populaire a invité le gouvernement à freiner cette numérisation des services publics « à marche forcée », réclamant « plus d’humanité » dans l’accompagnement des citoyens. Mais pour le gouvernement, la crise sanitaire aura justement prouvé la nécessiter d’accélérer ce processus. Avec la fermeture des guichets, le site gouvernemental « gouv.fr » n’a jamais autant servi qu’en 2020. Pour marquer son propos, Henriette Steinberg souligne cependant que lors de cette même crise, de nombreuses personnes n’avaient pas réussi à bénéficier des aides de l’État, car il fallait formuler la demande en ligne. Elle termine : « Ces populations se sont retrouvées avec rien du tout, et aucune connaissance de ce qui était possible de faire dans des situations pareilles […] cette transformation représente un enjeu économique, mais aussi social. »