Lorsqu’on évoque avec l’auteure la ressemblance avec L’âge de glace, notamment dans le rapport hommes de Néanderthal/mammouths, Sylvie de Mathuisieulx avoue ne pas y avoir pensé ! « C’est vrai, Mana et Manny (le mammouth du film NDLR), ça aurait pu être un clin d’œil, mais pas tout ! dit-elle en riant. En tout cas, je voulais un mammouth en Alsace, et l’idée de cette histoire remonte à très longtemps quand j’ai appris qu’il y avait tout près de Strasbourg une aire de découpage de rhinocéros laineux. Et les cigognes alors ? Ça m’avait éclatée ! » Du rhinocéros au mammouth, il n’y a qu’un pas, celui d’hommes de Néanderthal qui ont vécu à cette période chez nous.
Dès lors, elle « visualise une couverture avec un mammouth, parce que c’est un animal emblématique ». Benjamin Strickler est à l’illustration, et Daniel Fischer se charge de la postface, comme dans toute la collection Graine d’Histoire. « Mais Daniel est historien et non pas préhistorien, et je devais savoir comment faire évoluer mes personnages, note Sylvie. L’idée de cette jeune fille, Mana, qui veut théoriser les choses et provoquer des émotions avec ses récits, me faisait peur puisque je ne connaissais pas la capacité d’abstraction des Néanderthaliens ».
Elle passe un été à lire « absolument tout sur Néanderthal » et s’adresse à Héloïse Koehler, docteure en préhistoire. « Elle m’a confirmé qu’ils conscientisaient la fin de vie en enterrant leurs morts, ou qu’ils savaient anticiper des schémas de chasse ou la réunion au pied de cette falaise, en fonction des saisons, qui est réelle. »
Planter des graines
Dans un langage simple, Mana a donc les capacités intellectuelles pour raconter les formes qu’elle voit dans les nuages, ou les animaux en pierre : « On la regarde de travers parce qu’elle raconte des histoires, jusqu’à ce qu’elle rencontre des gens qui aiment ce qu’elle fait ». La dureté de la vie quotidienne, la maternité, la vieillesse, les relations hommes-femmes sont aussi abordées, et notamment les violences conjugales… « Le fait d’attirer l’attention sur ce qu’on accepte ou pas, pour une lectrice de 8 ou 10 ans, c’est peut-être important pour sa vie future de l’avoir lu dans un livre dont ce n’était pas le sujet…, estime l’auteure. Peut-être que ça a planté une petite graine, et pas seulement une graine d’Histoire ».
Le chiffre: 10
C’est le dixième roman de la collection Graine d’Histoire paru à La nuée bleue.