L’Alsadico répond à la question « Wie heist dïss ? »

Récemment réédité par La nuée bleue, l’Alsadico d’Edmond Jung est la référence français-alsacien pour qui voudrait réviser son dialecte ou retrouver un mot de son enfance : c’est la raison pour laquelle Pierre Kretz, auteur de la préface, l’utilise si souvent.

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Pierre Kretz, écrivain, a fait la préface du dictionnaire dont il se sert beaucoup. / ©Dr

Les dialectophones cherchent souvent leurs mots, ou plutôt UN mot précis. Pierre Kretz a fait face à cette situation récemment : « C’est la saison des foins, je sais le dire, s’Hau, mais je ne savais plus le mot regain, alors j’ai pris le Jung et j’ai trouvé s’Umt », se satisfait l’écrivain strasbourgeois. Avant d’enchaîner : « Sur la même page, il y a : refusé, refuser, refuser le combat, le mariage, sa porte, se refuser, réfutation, réfuter, regain, régal etc. C’est génial ! On peut le lire comme un bouquin ! »

Auteur de textes en dialecte, Pierre Kretz assure : « C’est mon outil de travail, même si je parle bien l’alsacien, je me demande comment Jung dirait ? » Voilà qui explique le succès du dictionnaire, et sa réédition pour un large public : « Les gens qui ont la trentaine ont un rapport affectif à la langue et bien souvent, envie de savoir même s’ils ne parlent plus l’alsacien ; un public de personnes plus âgées aussi a plaisir à retrouver des mots de l’enfance ou de l’entourage ; et enfin, des gens plus lettrés, car l’alsacien s’enseigne à l’université ». Car dans le Jung, on trouve aussi « des pages et des pages de grammaire, c’est incroyable cette absolue rigueur scientifique », et des notions de graphie et de prononciation.

Un fou de langues

Alors, comment Edmond Jung s’y est-il pris ? Si Pierre Kretz ne l’a pas connu avant son décès en 2002, il a beaucoup entendu parler de lui. « Comme il était professeur agrégé de grammaire au lycée de Bouxwiller, il a marqué ses élèves, qui ont joué dans une de ses pièces de théâtre en latin ! C’était un personnage original aussi, un écologiste des langues. Il avait des vaches dans son village, et toujours un carnet sur lui pour noter des trucs car c’était un fou de langues ».

Edmond Jung avait une théorie : « Quand on est dialectophone, il faut se référer à son dialecte de naissance. Le sien, c’est celui de Strasbourg où il est né, celui qui se rapproche le plus du Hochdeutsch. C’est assez cohérent, moi je suis un 67 et demi, sourit Pierre Kretz, j’utilise des mots du Sungdau de mon père et d’autres du Bas-Rhin de ma mère ». Mais l’Alsadico met tout le monde d’accord, « avec un bouquin comme ça, le dialecte est respectable, c’est une langue comme une autre ».


 

En chiffres : 22 000

Plus de 22000 mots, expressions, communes et prénoms alsaciens occupent les 500 pages de l’Alsadico.