samedi 23 novembre 2024
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Les oiseaux chantent – La plus belle symphonie

Il faudrait toujours écouter les oiseaux, tendre l’oreille au moindre gazouillis tant ces sons apportent du bien-être.

À la campagne, cette musique est naturelle, parfois si évidente, qu’on finit par oublier que, derrière ces gazouillis, se cachent de petits corps plumeteux, avec des yeux de la taille d’une tête d’épingle. Écouter les oiseaux est moins évident en ville. Et pourtant ils sont aussi présents. On s’en est rendu compte lors du confinement : leur chant apparut les premiers jours du confinement comme une anomalie. Tiens, se disaient certains, les oiseaux sont de retour, ils nous envahissent. En fait, ils n’étaient jamais partis, mais nous ne les entendions pas, tant les bruits couvraient leur chant et tant nous étions pris dans le tumulte de notre quotidien.

Lorsque revient le printemps, les oiseaux restés silencieux durant la froidure, font entendre le gazouillis. Ils chantent lorsqu’il fait encore nuit pour nous prévenir que l’aube va poindre. Je ne voudrais pas être ingrate et laisser les oiseaux mener ce concert sans les écouter réellement, sans essayer de détecter dans ces sons familiers le nom de leurs propriétaires : rouge-gorge, roitelet, mésange, pinson, bouvreuil, moineau ? Dans cette symphonie, chaque oiseau chante sa partition. L’ensemble devient un concert gracieux et donne la plus belle des symphonies. Je tends l’oreille pour me laisser investir par ces sons.

Si les oiseaux sont mes adorés, c’est parce que mon père me les a fait aimer lorsque j’étais enfant. Il les connaissait, il savait imiter leur chant. Il y avait ceux qui partageaient notre quotidien : le merle (d’Schwàrzàmsel) qui, avec sa riche gamme, gonfle mon cœur d’émotion. Mélodiste ou hâbleur, il chante son bonheur lorsqu’il fait beau, lorsqu’il va pleuvoir et aussi lorsqu’il a plu et que les arbres s’égouttent. Est-il heureux parce ce que la pluie s’arrête ou parce qu’après la pluie la terre est gorgée d’une nouvelle vie ? Ou alors parce qu’il peut aisément extirper les vers de la terre ? Il envoie son chant dans le soir depuis le faîte du toit. Je veux distinguer les mouvements de son corps et de son bec pour faire naître un chant si harmonieux. Il bouge à peine, son bec s’entrouvre sans grand mouvement. Parfois il s’envole en poussant un son taquin, comme un rire ironique, pour se déplacer dans un autre arbre, et de là, observer à nouveau le monde en en entamant de nouveaux tremolos.

Les variétés de mésanges, (d’Meise) célèbrent elles aussi le printemps. Elles sont mignonnes à croquer, surtout les huppées et les bleues dont les trilles métalliques et légères, infusent mon cœur d’une exaltation juvénile. Il y a aussi le chant si typé du chardonneret, que l’on voit moins souvent. Aussi est-ce une chance de voir sa tête rouge, blanche et noire et sa robe qui fait aussi intervenir le jaune. Le nom de ce passereau rappelle qu’il aime manger les graines de chardons. Cette particularité est aussi contenue dans sa dénomination alsacienne, de Dìschtelfìnk (le pinson des chardons). C’est pour son chant mélodieux qu’il est souvent capturé pour être revendu en captivité. Rare et prisé en Algérie, notamment à Alger, il devient ainsi l’objet d’un trafic, et les meilleurs chanteurs peuvent atteindre des prix conséquents.

Il y a également le roitelet si petit (de Zünkéni), le rouge-gorge (‘s Rotbrìeschtel) qui m’accompagne aujourd’hui encore lorsque je travaille au jardin, la bergeronnette (‘s Bàchstalzel) qui se désaltère à l‘arrosoir rempli, en hochant la queue tout en épiant son chant métallique.

 

Une mésange bleue. / ©document remis

L’hiver, nous pouvions observer mieux encore les oiseaux lorsque le sol était gelé et que la nourriture se faisait rare. Mon père faisait cuire pour les oiseaux des pommes au four qu’il disposait dans une petite maison en bois haut perchée, qu’il avait fabriquée à leur intention. J’y voyais tournoyer presque à portée de mains, une multitude d’oiseaux aux couleurs éclatantes. Je pense à la beauté du bouvreuil (de Blüetfink). Il arrivait même que le geai (de Hàhr), et le pic vert (de Rìndepìcker) descendent de la forêt pour se nourrir de ces pommes.

Lorsque je me promène en forêt, je retrouve ces deux derniers, parfois sans les voir, juste en les écoutant : le geai est une vigile parfaite, un guetteur qui signale le prédateur ou le promeneur par son chant strident, tandis que le pic vert tambourine de son bec sur les troncs d’arbres pour y trouver sa nourriture.

Les oiseaux qui égaient nos campagnes et notre quotidien doivent être protégés. Depuis 1980, chaque année, 20 millions d’oiseaux disparaissent en Europe et plus particulièrement en France, notamment par l’urbanisation, la pollution, les pesticides, la perte d’habitat, l’éclairage nocturne et le dérèglement climatique. Cette menace doit nous faire aimer encore plus cette petite faune à plumes, donneuse de tant de joies.

À la question du scénariste belge Jean Van Hamme : Qu’y a-t-il de plus beau qu’un oiseau libre qui vole vers le soleil ? Je réponds : des millions d’oiseaux .

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