Avant tout, je vous dois un aveu. Si je suis devenue la chantre de l’alsacitude, c’est par pur opportunisme. Quand je me suis lancée dans le One Woman Show, il me fallait trouver une façon d’émerger dans la faune des amuseurs publics. Et en humour comme partout, c’est ta différence qui fait ta force. Ma spécificité, c’est d’avoir quitté mon Alsace natale pour monter à Paris… sans passer par les AA (Alsaciens Anonymes) pour gommer l’accent et les aspérités qui trahissent mes origines. Plusieurs décennies de vie parisienne n’ayant toujours pas eu raison de mon accent alsacien, autant en faire quelque chose. Je deviens donc Catoch’, la Jane Birkin de l’Est, en mission pour alsacianiser le monde. Je rends ainsi la culture et l’humour alsacien accessible à tous – même aux Lorrains, c’est dire !
Et ce n’est pas une mince affaire. L’humour alsacien est en effet un humour d’initié, plein de références culturelles, impossible à exporter par essence, pour ne pas dire totalement abscons pour qui n’est pas Alsacien ni dialectophone.
Qui sait si nous n’avons pas trouvé là le chaînon manquant pour que l’Alsace soit enfin vue et aimée telle qu’elle est ?
Pour l’heure, dans l’imaginaire populaire, l’Alsace c’est les cigognes, la choucroute, la bière, le bretzel, la coiffe, des noms de villages qui feraient un carton au scrabble… mais au-delà de cette image d’Épinal, c’est le grand flou. Même au journal de 20 heures, il arrive encore que Strasbourg se retrouve placée outre-Rhin sur une carte. Le Français moyen ne connaît souvent de l’Alsace que le marché de Noël de Strasbourg, ou de Colmar. Quand il prétend
« connaître l’Alsace », c’est juste qu’il a passé trois jours à faire le tour du marché de Noël pour en revenir avec un magnifique exemplaire d’artisanat alsacien… made in China !
Si cette situation désole mon petit cœur d’Alsacienne, j’avoue que l’opportuniste en moi s’en délecte. C’est le carburant de mon spectacle « Alsacienne d’Origine Contrôlée », qui aurait aussi pu s’appeler « L’Alsace pour les nuls ». Il se conclut d’ailleurs dans sa VF par un tuto de survie en Alsace. Mon opportunisme porte enfin ses fruits : quiconque cherche à faire le trait d’union entre l’Alsace et la France de l’intérieur tend spontanément à penser à moi.
C’est ainsi que le mois d’octobre devient petit à petit MON mois. Car qui dit octobre dit Oktoberfest, qui dit Oktoberfest dit fête de la bière, qui dit bière dit Alsace, et qui dit Alsace dit Catoch’. CQFD. Un raccourci Alsace-bière tout à fait pertinent. Certes l’Alsace ne compte plus 287 brasseries comme dans les années 1860 – où un train de bière partait chaque jour étancher les gosiers parisiens – mais elle produit toujours 60% de la bière consommée en France. C’est la seule région de France qui possède le sol et le climat nécessaires à produire ce houblon à l’arôme incomparable. Toute bière venant d’ailleurs devrait s’appeler bibine. Sinon, c’est de l’appropriation culturelle (comme toute Alsacienne qui se respecte, j’ai le sens de la mesure).
« Après les spectacles, les festivals, les anniversaires, les séminaires, les croisières… me voilà donc animatrice de Fête de la bière ! »
Pour passer de la bière à Catoch’, il n’y a qu’un pas… franchi au Festival Off Avignon par l’organisatrice de la fameuse Oktoberfest de Verneuil-sur-Seine. Après avoir envisagé une représentation du spectacle finalement peu compatible avec une fête en plein air où les gens vont et viennent, elle finit par m’avouer : « En fait, moi ce que je voudrais, c’est que vous fassiez la même chose que ce que vous faites en distribuant vos flyers dans les rues d’Avignon ».
Et c’est vrai que j’aime tellement ce contact, concentré d’énergie, d’impro et d’humour, que je serais capable de créer un spectacle rien que pour avoir une raison d’aborder les gens dans l’espace public. C’est vrai aussi que déambuler en costume et coiffe pour célébrer la culture et la joie de vivre… est complètement dans l’esprit de l’Oktoberfest. Il ne manque plus que la bière ! Et ça tombe bien : j’ai suivi, encore une fois fort opportunément, une formation accélérée façon Benny Hill au Météor – première et plus ancienne brasserie indépendante de France – en prévision de mon dîner-spectacle au village Météor pendant la Foire européenne de Strasbourg !
Après les spectacles, les festivals, les anniversaires, les séminaires, les croisières… me voilà donc animatrice de Fête de la bière ! Je deviens « Catoch’, l’humoriste alsacienne qui met l’ambiance » qui « apporte une dose d’Alsace, beaucoup de bonne humeur et l’esprit Oktoberfest partout où elle passe » (dixit le programme de Verneuil-sur-Seine). Pour une fois, pas d’accordéon ou de oumpapa, mais des sketches, des quizz, des jeux, des interviews, des impros, des animations de stands et des blagues à gogo. On a encore bien rigolé, nom d’une quetsche !
L’info en plus
Retrouvez Catoch’ sur scène le 16 octobre au Festival alsacien de Geispolsheim.
