samedi 23 novembre 2024
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Alexandre Jung – Un chef dans le vent

Le Luxembourg, Niederbronn, Paris, Saverne, Mulhouse et maintenant Strasbourg: le nouveau directeur du Conservatoire à rayonnement régional a beaucoup voyagé, mais a choisi de construire sa maison à Dauendorf. De l’Institution Sainte-Philomène et son bac option musique aux finales de prestigieux concours internationaux de direction d’orchestre, Alexandre Jung, 40 ans, a suivi les premières notes de sa clarinette au conservatoire de Haguenau jusque dans les plus belles salles de concert d’Europe. Une passion qu’il incarne de différentes façons, toujours convaincu que la musique est vectrice d’éducation.

Vous faites vos premiers pas dans la musique avec la clarinette à 6 ans, votre famille est-elle musicienne ?

Mes parents ne sont pas musiciens, mais mon grand-père dirigeait la batterie fanfare de Haguenau. La clarinette est l’instrument qui m’a permis d’accéder à la musique, j’étais déjà au conservatoire et j’ai pu m’initier à la direction d’orchestre, à 15-16 ans. J’ai eu une chance énorme de mettre en action directement ce que j’apprenais en dirigeant l’orchestre amateur de Schweighouse-sur-Moder. Depuis ce jour, je n’ai jamais arrêté.

D’amateur à professionnel, chef d’orchestre est devenu votre métier ?

Comme tout le monde, on est amateur dans le sens noble du terme parce qu’on aime ce qu’on fait. Lorsque ça devient professionnalisant, cela permet de gagner sa vie. L’Alsace est riche en orchestres à vent, pour lesquels j’ai développé une réelle passion, mais que l’on voit essentiellement en pratique amateur. Donc j’ai répondu à la question en faisant une partie de mes études au Luxembourg. Les seuls orchestres à vent professionnels en France sont dits en uniforme, comme la Garde républicaine. À 24 ans, je me présente au concours de chef de la musique de la Police nationale, et je me retrouve plus jeune chef, devant 153 musiciens.

Alexandre Jung à son poste de chef d’orchestre. / ©CRD Symphonique
Vous êtes même nommé commissaire de police par ces fonctions, quelles étaient vos missions ?

Des concerts bien sûr, on défendait le répertoire originel de l’orchestre à vent, et je pouvais faire des créations. Des missions plus protocolaires aussi, le 14 juillet, les hautes cérémonies, les obsèques de policiers, des enregistrements, et une mission d’éducation artistique et culturelle. En tant que musicien policier, j’allais dans les quartiers difficiles, cela amène un lien sympa. C’était un vrai choix de diriger un orchestre à vent professionnel, une belle maison, mais l’appel de l’Alsace s’est fait sentir…

Un long parcours vous a mené de directeur adjoint à l’école de musique du canton de Niederbronn au conservatoire de Strasbourg, racontez-nous.

Oui après mes études, j’ai pu découvrir à Niederbronn le secteur associatif, avec 200-300 élèves à l’époque, j’ai touché à tout, la gestion de l’établissement, le personnel, la communication… Après la police, l’opportunité s’est présentée à Saverne où je suis resté dix ans à la tête de l’école de musique. Au fur et à mesure des montées en compétences, j’ai eu l’envie de diriger un établissement classé par l’État, j’ai été retenu à Mulhouse, avec une image à redorer dans un tout nouveau conservatoire de 1700 élèves. Il y a eu un gros travail à l’école autour de l’éducation artistique et culturelle, et une autre nouveauté avec l’auditorium de 300 places et une programmation qui allait de la musique de chambre au hard rock, toutes les ouvertures étaient possibles !

Et vous bouclez la boucle au conservatoire de Strasbourg où vous avez étudié, et finalement pris la direction le 16 août, conjointement à la HEAR, la Haute École des Arts du Rhin.

Le Conservatoire à rayonnement régional de Strasbourg a la particularité de proposer l’enseignement supérieur, ce qui permet de travailler de l’éveil jusqu’au doctorat, et d’être en circuit court, pour comprendre les enjeux et les besoins de l’enseignement artistique, et préparer les professionnels de demain à ce terrain-là. J’y étais élève et je suis très honoré de venir fort de mon expérience au sein d’un pôle ressource pour la région dans la musique, la danse et les arts dramatiques.

Le chef à la tête de l’orchestre à vent de la Police nationale. / ©Dr
Jouez-vous toujours de la clarinette ? (sourire)

Je l’ai pratiquée longtemps, notamment dans le quatuor Ebony, aujourd’hui elle est un peu au placard. La direction d’établissement est chronophage, il a fallu faire un choix voire un deuil. Je me sens musicien quand je dirige un orchestre, c’est là mon activité artistique.

Quels orchestres dirigez-vous actuellement ?

Depuis plus de dix ans, je dirige l’orchestre de l’Harmonie de Saverne, d’autres font du foot le jeudi, moi je dirige, et au-delà de la pratique, c’est devenu des amis. La Ville soutient ce bel orchestre de 80 musiciens, les conditions sont super dans l’écrin du château des Rohan.

Mais vous êtes aussi chef invité parfois, quelle est la différence ?

Lorsque vous êtes chef invité, on appelle cela des séries, j’en sors à Mulhouse avec les cuivres : je les ai rencontrés le mercredi, j’ai eu les partitions avant, les musiciens aussi, le concert était le vendredi. C’est donc court, mais intense ! C’est le propre d’un chef professionnel, en quelques secondes, il faut cerner l’orchestre, ses forces, ses faiblesses, et le gros du travail se fait à la maison.

Avez-vous une touche personnelle en tant que chef d’orchestre ?

Il faut être à l’écoute de l’orchestre, avec beaucoup d’humilité, souvent il a déjà fait une œuvre cinquante fois avec des chefs excellents ! Je suis assez attentif au respect de ce que le compositeur a écrit, à l’esthétique, au son, pour arriver vers une notion de plaisir, de beau. L’objectif est d’arriver avec une couleur et un équilibre qui vous emportent et entre forcément en résonance avec le public.

Vous avez deux filles de 11 et 6 ans, pratiquent-elles un instrument ?

Mes filles baignent dans la musique, la grande fait du cor et la petite va démarrer la trompette à l’école de musique de Haguenau. Je n’ai pas influencé leurs choix, elles vont rester dix ans a minima avec leur instrument, c’est important qu’elles aient eu cette sensibilité vers les sons et la sensation de jeu. Je ne suis pas très présent, mais comme tout bon parent, j’évoque souvent le fait que la musique apprend à apprendre, cela les structure, les oblige à la patience, à la méthode et force est de constater l’impact sur leurs résultats scolaires et leur fonctionnement au quotidien.

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