Audi e-Tron : les Anneaux sortent l’artillerie lourde

La guerre des grands constructeurs change petit à petit de théâtre des opérations. C’est sur le terrain de l’électrique que se déroule aujourd’hui la mère de toutes les batailles. Tesla, qui a ouvert les hostilités, n’est plus seul : après Jaguar, c’est au tour d’Audi de dégainer son SUV 100 % électrique. Baptisé e-Tron, le nouveau venu parvient-il à repousser les limites du genre ?

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L’arrivée d’une jeune marque insolente d’audace comme Tesla a réveillé les grands barons du premium. Certes, ceux-ci ont pris leur temps avant de s’intéresser un tant soit peu à l’électrique, eux qui ont bâti leur glorieuse histoire sur les moteurs thermiques. Leur transition n’est d’ailleurs pas des plus rapides, et pour cause : ils ont longtemps considéré que l’électricité était parfaite pour les citadines mais peu adaptée pour les berlines et les grands crossovers. BMW en est le meilleur exemple.

Si l’Hélice a ouvert le bal avec sa citadine i3, elle ne sortira son premier SUV tout électrique que dans un ou deux ans. Mercedes a pris le parti d’intégrer un ensemble électrique à une base technique pensée pour des moteurs traditionnels, avec toutes les limitations que ce choix peut entraîner. La surprise est venue de Jaguar qui a dégainé en premier son très réussi i-Pace. La machine est toutefois lancée. Audi l’a bien compris qui ne souhaite prendre aucun retard supplémentaire sur cette marche en avant. L’e-Tron est donc là pour mettre les pendules à l’heure.

Haute technologie

L’e-Tron vient se placer entre le Q5 et le Q7. C’est en tout cas ce que son gabarit imposant laisse paraître. Mesurant 4,90 m de long, 1,94 m de large, 1,62 m de haut et 2,93 m d’empattement, il s’impose comme l’un des grands seigneurs de la route. Malgré ces dimensions généreuses, il n’affiche pourtant qu’un coefficient de pénétration dans l’air de 0,27, inférieur à celui du petit Q3. Comment une telle prouesse est-elle possible ? Les ingénieurs ont redoublé d’astuce pour diminuer au maximum toute source de surconsommation. À partir de 80 km/h, des volets situés sur la calandre, les flancs et l’arrière s’actionnent automatiquement et viennent rediriger les flux d’air de manière optimale. La hauteur de caisse variable et le fond plat complètent une redoutable panoplie aérodynamique.

Petit détail qui ravira les technophiles et qui devrait faire des émules dans les années à venir, les rétroviseurs cèdent leur archaïque miroir pour des caméras. La vision de ce qui se passe sur les côtés et à l’arrière du véhicule est déportée à l’intérieur, dans l’angle des portières, où elle est retransmise par des écrans haute définition Oled de 7 pouces. Le tout étant tactile, il est possible, comme sur une tablette ou un smartphone, de zoomer et de dézoomer à son gré, ainsi que de changer l’angle de vue : adieu les angles morts ! Hormis cette petite touche futuriste, l’e-Tron ne fait pas dans la surenchère esthétique que l’on retrouve souvent chez les modèles électriques. Nous sommes en fasse d’un SUV Audi pur jus, élégant et épuré.

Sous le capot, l’e-Tron embarque deux moteurs électriques posés chacun sur un essieu. Le dispositif arrière développe 190 ch et s’occupe de la motricité en conditions normales. Le bloc avant, de 170 ch, intervient lors des fortes poussées et lorsque des besoins accrus en puissance se font sentir. L’e-Tron dispose ainsi de 360 ch et de 561 Nm de couple pour un 0 à 100 km/h avalé en 6,6 s. La puissance totale n’est disponible que durant 60 secondes, pour éviter la surchauffe. Pendant 8 sec, le mode boost libère 50 ch supplémentaires. Autant dire que, pour un SUV de près de 2,5 t, les performances sont remarquables.

La récupération d’énergie au freinage repose sur trois niveaux d’intensité : via une palette placée derrière le volant, on va de la roue libre à la décélération jusqu’au freinage complet lorsque l’on lève le pied de l’accélérateur, rendant presque inutile la pédale de frein. Il faut un petit temps d’adaptation pour s’habituer à ce système mais celui-ci permet de gagner jusqu’à 30 % d’autonomie. Bonne nouvelle, le mode automatique laisse l’ordinateur gérer seul le mode de récupération en fonction du profil de la route.

Grandeur et contingences

Ainsi doté, l’e-Tron assume un rayon d’action de 400 km, homologué par les strictes normes WLTP. Sur autoroute, il sera difficile d’atteindre une telle portée, mais les constats concordent sur route secondaire ou en ville, là où la récupération d’énergie au freinage est utilisée fréquemment. C’est moins bien qu’un Jaguar i-Pace ou qu’un Hyundai Kona EV qui affichent tous deux une petite centaine de kilomètres en plus. L’autre limite de l’exercice est la recharge. Les larges batteries qui fournissent 95 kWh mettront à rude épreuve la patience des utilisateurs. Il faut compter plus de 40 heures sur une prise domestique classique. Une éternité réduite à 8 h 30 sur une prise 11 kW (de type Wallbox) et à 4 h 30 sur une prise 22 kW (borne publique). Le déploiement du réseau Ionity, initié par un consortium de constructeurs (VW, Mercedes, BMW, Ford, etc.) pour contrer les Superchargeurs de Tesla, viendra réduire à 30 minutes ce délai grâce à ses prises 150 kW, mais il faudra attendre 2020 pour que le maillage soit suffisant.

L’Audi e-Tron, qui s’affiche toute de même à 82 600 € avant bonus de 6 000 €, impressionne donc par la technologie de pointe qu’il déploie, le sentiment de confort unique qu’il procure et les performances qu’il affiche, mais il ne lève pas encore tous les doutes sur l’opportunité de cette alliance entre les grands SUV Premium et l’électricité.