Césars 2020 : Carte blanche à Isabelle Alonso

Quelques jours après une cérémonie des Césars qui restera dans les mémoires, et quelques jours avant la Journée Internationale de Lutte pour le Droit des Femmes, nous avons laissé carte blanche à l'écrivaine et féministe Isabelle Alonso.

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Portrait of Isabelle Alonso 30/09/2015 ©Philippe MATSAS/Opale/Leemage

BRAVO LES FILLES !

La dernière soirée des Césars, quelques jours avant le huit mars, a célébré la journée des Droits des Femmes avec plus d’éclat que ne vont le faire les innombrables prises de parole officielles. Comment ça? Ce moment embarrassant où un violeur en série s’est vu récompensé par la distinction suprême du cinéma français aurait du positif ? Cette défaite symbolique des victimes face à leurs agresseurs triomphants serait une source de satisfaction ?

Ça peut sembler paradoxal. Je comprends. Sauf si on y regarde de plus près. Florence Foresti instagramant un mot unique: « écoeurée », après qu’à l’annonce du résultat elle décide de ne plus réapparaître sur la scène? Inimaginable. Adèle Haenel, Noémie Merlant et Céline Sciamma quittant la salle en criant à la honte? Impensable. On n’avait jamais vu ça. Ces défis à l’ordre établi portent comme une oriflamme la marque de MeToo.

MeToo, la parole des femmes, notre parole à toutes, trouve enfin un écho au coeur même des institutions. Avant MeToo, personne n’aurait osé tourner en dérision, puis tourner le dos à la puissance des hommes. J’aurai eu la chance de voir ça, 25 ans après avoir publié mon premier livre féministe.

Le jury a cru bon de faire un bras d’honneur à la prise de conscience générale. À celles qui ont vécu ce moment comme une humiliation supplémentaire j’ai envie de dire qu’avant nous des dizaines de générations n’ont eu d’autre choix que de se taire et ravaler leur rage. Les jurés du 7e art ont perdu la bataille. On n’arrêtera pas cette révolution.

La bête patriarcale est solide et rancunière. Pour l’abattre il va falloir beaucoup de courage et d’entêtement, beaucoup d’hommes à nos côtés. Ce n’est pas fini. Ça ne fait que commencer.