Le Sonnenhof : un nouvel avenir qui ne fait pas l’unanimité

Pour répondre aux attentes et aux besoins des travailleurs en situation de handicap, la Fondation Sonnenhof souhaite reconvertir les activités agricoles de son Établissement et Service d'Aide par le Travail (ESAT). Une décision loin de faire l’unanimité : la pétition en ligne pour le maintien de la ferme a réuni plus de 15 000 signatures.

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L’exploitation agricole du Sonnenhof prépare sa mutation. ©Fondation du Sonnenhof

L’ESAT propose des parcours professionnels dans diverses filières : menuiserie, impression et marquage, couture, conditionnement, jardinerie, horticulture, etc. L’exploitation agricole, qui fait partie de ces filières, accueille 18 des 275 personnes accompagnées par l’ESAT et emploie 5 des 800 collaborateurs salariés. Depuis plusieurs années, cette filière est en déficit structurel, et, selon la Fondation, très peu de jeunes souhaitent s’y investir, en raison de l’exigence du travail qui leur laisse peu de temps libre. Par ailleurs, l’activité ne serait plus adaptée : « Seuls les moniteurs peuvent réaliser les gestes techniques et conduire les engins, trop dangereux pour les jeunes. De plus, les grands espaces ne favorisent pas un accompagnement adéquat », explique Paul Artis, directeur du Pôle Travail Adapté.

Un projet ambitieux qui fait débat

Après la réalisation d’une étude, il a été décidé de reconvertir les activités agricoles au sein de l’ESAT. Un appel à manifestation d’intérêt sera lancé pour rechercher des partenaires qui construiront ce projet avec la Fondation. Lors d’une conférence de presse organisée le 18 février, les dirigeants ont assuré que la reconversion ne signifiait ni la démolition des bâtiments de la ferme, ni la vente des terres, qu’il n’y aura pas d’impact sur l’emploi et que toutes les personnes concernées se verront proposer une affectation correspondant à leur projet.

Le travail de la terre au Sonnenhof est inscrit dans le paysage local depuis près de 145 ans, comme le prouve l’activité horticole. ©Fondation du Sonnenhof

Des explications qui n’ont pas convaincu les 80 personnes qui ont manifesté dimanche 22 février pour le maintien de l’activité agricole. « Cette décision est totalement incompréhensible », se désole l’organisateur de la manifestation, Sofiane Jung-El Hamlili. Quelques jours auparavant, il avait déjà lancé une pétition qui avait réuni plus de 15000 signatures. « Je ne m’attendais pas à une telle mobilisation : clients, agriculteurs, travailleurs handicapés et anciens salariés ont pu livrer leur ressenti sur cette décision et le climat ambiant. Là, c’est la goutte de trop ! » poursuit-il en rappelant que cette ferme est l’une des dernières à être gérée par un ESAT.

« C’est un emblème de ce que nous souhaitons : celui d’une société qui n’abandonne pas les plus faibles, mais qui leur tend la main. La direction doit se donner les moyens pour poursuivre les activités de cette ferme. »
Sofiane Jung-El Hamlili

Gérard Helmstetter, ancien directeur de l’ESAT, dénonce dans un communiqué « une erreur très grave du conseil d’administration ». Selon lui, « les recettes des activités de production ou de services sont toujours comptabilisées dans un compte de résultat à part. Celui-ci, sauf erreur grossière du gestionnaire, ne peut pas être déficitaire puisqu’il n’est pas amputé par les frais de structure, ni les coûts salariaux des moniteurs encadrants, y compris ceux de la ferme. Ces coûts importants étant pris en charge par l’État. L’ESAT du Sonnenhof dégage un confortable excédent net de 928 665 € (le résultat de 2020 n’est pas encore publié). »

Jean-Claude Girardin, le président du Conseil d’administration de la Fondation ne comprend pas ces réactions :

« Notre seul intérêt est de répondre aux attentes de nos usagers et de leur rendre la vie agréable. Il est également très important pour nous de conserver notre lien avec la terre. Nous allons procéder à une mutation d’une partie de notre activité, que nous souhaitons réaliser en toute sérénité et en prenant le temps de choisir la meilleure solution »

De son côté, Sofiane Jung-El Hamlili garde bon espoir : « nous continuons le combat pour que la direction prenne en compte l’engagement suscité ».