Mal-aimés en Roumanie, adoptés ici

Depuis les années 80 en Roumanie, les chiens errants prolifèrent dans ce pays. En France, plusieurs associations sont nées pour secourir ces animaux et les rapatrier dans l’hexagone. Dans le Nord-Alsace, à Dambach, Audrey Jonier a fondé Audrey’s and co en 20017 et a déjà fait adopter près de 440 chiens.

0
4366
Un rescapé de la rue ©Audrey’s and co

Tout a commencé sur un coup de tête. En 2017, Audrey Jonier est famille d’accueil pour une association qui achemine des chiens venus principalement de l’Île de la Réunion. Parmi les rapatriés, une petite chienne, Kimbra, vient, elle, de Roumanie. Elle décide alors de l’accueillir chez elle. “Elle était traumatisée, sur la réserve, une chienne assez compliquée. Je me suis demandé ce qu’il s’était passé pour qu’elle soit dans un état pareil. J’ai lancé un appel à l’aide sur les réseaux, j’ai récolté des dons et en deux mois j’ai organisé le premier voyage”, explique la présidente de l’association Audrey’s and co. Arrivée sur place, ses craintes se confirment. “Une fois la frontière passée, il y a un chien errant tous les cent mètres, que ce soit un vieux, un jeune, un chiot, vivant, blessé ou mort”, décrit-elle. 

Audrey Jonier, fondatrice de l’association Audrey’s and co. ©Audrey’s and co

Dans les années 1980, le régime de Nicolae Ceaușescu a détruit des quartiers entiers de maisons avec cours, et les a remplacés par des barres d’immeubles. Cette urbanisation forcée a déclenché une grande vague d’abandons de chiens. Depuis, la Roumanie fait face à une multiplication des chiens errants. Les campagnes de stérilisation manquent et les conditions de vie des chiens attrapés par les “dogcatchers”, employés des fourrières, ont encouragé Audrey Jonier à créer sa propre association. “Les euthanasies ne se passent pas comme chez nous. Là-bas, ils leur font des injections, donnent des coups ou leur mettent une balle dans la tête. J’avoue que sur place ça a été très compliqué. Dans la fourrière que j’ai visitée, les chiens qui restaient étaient prostrés. Les autres venaient d’être tués sous leurs yeux…”, déplore-t-elle. Depuis elle vient en aide à ces canidés depuis la France et ce sont près de 440 animaux qui ont pu trouver une famille aimante grâce à sa structure. 

Au siège de l’association, Audrey et son équipe ont aménagé le sous-sol pour pouvoir accueillir les chiens arrivés de Roumanie le temps que leurs nouveaux propriétaires viennent les récupérer. ©Audrey’s and co

40 chiens et trois chats rapatriés et adoptés en France en janvier 

L’association est en relation avec une fondation en Roumanie, ainsi qu’avec une particulière qui a aménagé un refuge de fortune dans son jardin, avec les moyens du bord. “En général, on a un rapatriement par mois, après ça dépend des demandes d’adoption. Le 16 janvier on a eu un rapatriement de 43 animaux, dont trois chatons, trois chiens adultes et 37 chiots”, explique Audrey Jonier qui a réussi à faire adopter une vingtaine de chats roumains depuis 2017.

Contrairement aux refuges, il n’est pas possible de rencontrer l’animal avant l’adoption. Les papiers sont remplis au préalable, puis les adoptants récupèrent leurs compagnons à quatre pattes une fois arrivés en Alsace via un transporteur spécialisé. Un procédé qui n’a pas fait peur à Justine Pflaum, nouvelle famille de Murdo, renommé Ralph, depuis le 25 octobre 2020. “Je suis sensible à la cause animale et notamment à celle des animaux de Roumanie puisque mon cheval en est aussi originaire. Je l’ai su après l’avoir récupéré, ce qui m’a permis d’être renseignée sur les conditions de vie des animaux dans ce pays. Quand j’ai su que les chiens de l’association venaient de Roumanie, j’ai trouvé que c’était un beau pont à faire”, développe-t-elle. Ce qui l’a rassurée : le suivi des animaux une fois adoptés. 

Murdo, renommé Ralph, a été adopté par Justine Pflaum et son mari en octobre dernier à ses quatre mois. ©Mathias Pflaum

L’association ne perd pas de vue ses petits protégés dont les propriétaires donnent régulièrement  des nouvelles sur une page Facebook dédiée. “Je leur ai fait confiance, parce que j’ai trouvé qu’il y avait un vrai suivi, quand on a lancé la démarche ils nous ont donné un grand dossier avec toutes les explications. On a vraiment eu le kit du débutant ! J’ai aussi eu l’impression que s’il y avait eu le moindre souci, on aurait pu les contacter et ils nous auraient aidé à trouver une solution”, ajoute Justine Pflaum qui donne des nouvelles de Ralph environ une fois par semaine. Le prochain rapatriement est prévu le 30 janvier avec 37 nouveaux “loulous”, comme aime les appeler Audrey Jonier.

Amélie Rigo