On Ruffet le match #3 – Marre des hautes lumières

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Sébastien Ruffet ©Hugo Cappa

Quelle époque on vit ! Oui, on savait que la consommation des médias avait changé : toujours plus vite, toujours plus court, toujours plus de résumés… On enlève les prolongations en coupe, on met un tie-break au 5e set en Grand Chelem (et d’autres veulent les réduire à deux sets gagnants ! Hérésie !), on enlève le principe de celui qui sert gagne le point au volley, on réduit la durée des sets au tennis de table… Bref, on dénature les sports parce qu’en dessous de 25 ans, on n’est pas concentré. Pardon, mais zut.

Et dans ce même état d’esprit, que veut-on voir ? Des « highlights ». Alors ça, tu vas sur YouTube, il y en a pour tout. Tous les sports y passent. Les meilleures actions du Racing (bon, ça va assez vite en ce moment), les plus beaux points du dernier match de Nadal, les plus belles approches du dernier Master de golf, etc. Cela pose plusieurs problèmes. Vraiment.

Le très bon devient banal

D’abord, ne visualiser que les highlights, ça finit par rendre banales les actions qui sont juste belles, mais sans atteindre un niveau de légende. Et puis même : ce qui rend exceptionnel l’exceptionnel, c’est qu’il vient s’inscrire dans un moment plus calme, plus « classique ». Trois échanges sans rien de fou, et là bim coup droit long de ligne à 153 km/h. Là, oui, tout le monde se lève. Une possession de balle stérile pendant 28 minutes, et d’un coup, bam, passement de jambe, passe à l’aveugle, et là oui, tout le monde se lève.

Mais quid de la petite volée de revers, finement touchée, mais pas hyper spectaculaire ? Mouais, ok… Et cette remise en une touche pile dans le bon timing pour le coéquipier ? Mouais, ok… En gros : une génération de blasés, et ça touche tous les sports, du foot au basket en passant par le tennis.

L’autre gros problème, c’est que les jeunes ne jurent que par ça. Un mot a disparu du vocabulaire sportif : l’efficacité. Petit pont, flip-flap, coup du foulard enchaîné et… la vidéo s’arrête. Où est le ballon ? Comment s’est finie l’action ? Je vais vous le dire : par un centre dégueulasse. Les highlights du basket emmènent aussi nos jeunes vers une vénération du un contre un et un oubli de plus en plus assumé de l’aspect défensif.

Cette recherche constante de l’humiliation ne se rapproche même pas de la beauté du geste. Le geste est beau parce qu’il sert à quelque chose. Revenons au geste. Efficace. Et élégant.