Strasbourg – Isabelle Alonso et La peau de l’ours aux Bibliothèques Idéales

Romancière, essayiste et féministe, Isabelle Alonso publie son 15e livre, La peau de l’ours, pourquoi je reste de gauche (Éditions du Rocher). Son premier ouvrage politique en forme d’acte de résistance. Elle sera à Strasbourg dimanche 28 janvier à 17h à l’auditorium de la BNU, dans le cadre des Bibliothèques Idéales, cinq jours consacrés au féminisme (programme complet sur biblideales.fr).

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Isabelle Alonso ©Sophie Palmier-Réa
Votre gauche est sentimentale, naïve, spontanée, elle rêve, c’est celle des lendemains qui chantent comme vous l’écrivez, mais cette gauche n’exerce pas le pouvoir !

Oui, à chaque fois qu’il y a une tentative quelque part dans le monde, la réaction des possédants, de la bourgeoisie, de ceux qui ont le pouvoir est sauvage. C’est-à-dire qu’ils ne respectent pas eux-mêmes les règles d’un jeu qu’ils ont fixées. Et puis, la gauche de gouvernement a trahi ses propres engagements. Il faut un courage politique qui de manière évidente a manqué.

Votre livre est un traité politique sur le néolibéralisme qui déshumanise le monde ! Vous écrivez dans votre essai : « On n’a plus les moyens d’être simplement humain ? C’est devenu trop cher de ne pas être un salaud ». Vous faites référence à Romain Gary qui avait le discours le moins néolibéral qui soit. « Ce sont les faibles qui sauvent l’honneur »,
a-t-il écrit.

Évidemment que l’on n’est pas faible si l’on continue à garder son intégrité dans un tel contexte, c’est même très fort, mais c’est fatigant de résister sans arrêt, de continuer à affirmer des principes qui devraient être des évidences.

La peau de l’ours, pourquoi je reste de gauche (Éditions du Rocher). / ©Dr
Vous écrivez aussi que vous avez été élevée dans l’idée que les plus forts soutiennent les plus faibles. Les grands aident les petits. On n’abandonne personne, on est ensemble ! Ces valeurs-là, c’est terminé ?

Je pars du principe qu’un être humain mérite de vivre, qu’il a le droit d’avoir un travail, de quoi manger, un toit sur sa tête. Dans un système prôné par l’archétype du néolibéralisme, ceux que l’on considère comme des losers, souvent sous-payés, font les boulots les plus nécessaires à la bonne marche de la société. Ce qui m’a énervé, c’est ce discours qui constate que les choses ne vont pas du tout et qui continue à affirmer que le néolibéralisme fonctionne. Mais ça ne marche pas du tout. Les gens souffrent énormément, et une fois qu’ils sont dans la souffrance, on les accuse de ne pas jouer le jeu.

On est en train de perdre notre humanité ?

Il faut dire que l’on est dans une sacrée machine à décérébrer. Avant, quand on lisait le journal, ça prenait du temps, l’article s’imprimait dans la tête, maintenant, on regarde les petites vidéos, on s’en nourrit, mais cela ne donne aucun sens de la synthèse. Une image chasse l’autre. On est en train de se laisser coloniser notre intelligence.