vendredi 22 novembre 2024
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Tellement alsacien, le cognassier du…Japon

On le dit du Japon. Pourtant ce cognassier d’ornement fleurit merveilleusement en Alsace, en des teintes allant du rose pâle au rouge sang en passant par la couleur brique. Ma préférence va au rose, la teinte que portait le cognassier que je voyais dans l’enfance, dans le jardin des voisins.

Je trouvais que rien n’égalait la beauté de cette haie. Il m’arrivait d’arracher en cachette une de ces fleurs roses, pour observer ses étamines jaunes. Je peux aujourd’hui l’avouer, car les décennies passées font prescription : j’aimais ensuite rouler ses étamines dans mes paumes et les meuler comme une semoule végétale. La texture, la sensation ressentie restent encore fortement présentes, intactes, à ma mémoire.
En hiver, je pensais que j’avais rêvé et que cette haie totalement dégarnie ne pourrait refleurir.

Car le cognassier du Japon perd totalement ses feuilles en hiver. Il a cette particularité : les fleurs apparaissent sur les branches avant les feuilles, et ce dès mars, comme pour le forsythia. Lorsqu’au printemps, les fleurs avaient éclos à nouveau, j’étais rassurée de voir la saynète se reproduire.

Cognassier en mars avec ses fruits jaunes oubliés à ses pieds. / ©S.M.

Je trouvais que posséder une si belle haie était une vraie richesse. Aussi ma surprise fut grande lorsqu’à l’adolescence je vis que les voisins arrachèrent la haie de cognassier du Japon. Je trouvais cela criminel et aucune excuse ne trouvait grâce à mes yeux.

Bien plus tard, après le décès de mes parents, je décidais, avec une forte sensation de liberté, de planter un cognassier du Japon dans un endroit du jardin resté vacant. Je pouvais choisir entre diverses teintes. J’ai choisi du rose, la teinte que portait le cognassier de nos voisins. Depuis, ce cognassier du Japon refleurit chaque année et ses fleurs roses continuent à m’émouvoir.

Cognassier du Japon couleur saumon. / ©S.Morgenthaler

En allemand, on l’appelle Brennender Dornbusch, ce qui signifie le buisson épineux flamboyant. On le désigne aussi par le terme Schienquitte (le coing d’apparat). Les Anglais le nomment Quince (ce qui signifie le coing). En latin, il s’appelle Chaenomeles Speciosa Eximia. Il fleurit de mars à avril, il peut atteindre 3 m de haut et jusqu’à 2,5 m de large. Au Japon, il pousse à l’état sauvage. Cette raison me semble suffisante—bien qu’il y en ait d’autres—pour me rendre un jour dans ce pays.

Je ne vous ai pas encore dit que ce cognassier donne des fruits à l’automne, des coings miniatures de couleur jaune or. On peut les ramasser en automne, mais il arrive que le feuillage dense ne permette pas de voir tous les fruits sur ces branches. Aussi ai-je la surprise chaque printemps, à mon premier retour au jardin, de découvrir ces coings jaune vif tombés au sol au pied de la haie. Crus, ces fruits sont immangeables : ils sont durs et très acides.

Raymond Herr, un Alsacien de Montréal (où il a enseigné les mathématiques jusqu’à sa retraite), m’a appris que ces fruits donnent une bonne gelée ou une confiture (nommée souvent gelée ou confiture de cananga).

Cananga photographiés à Montréal. / ©Raymond Herr

Voici les conseils qu’il m’a donnés pour réussir ce qu’il appelle « une compote de cananga » qui est en fait une confiture :
Les fruits, lavés, non épluchés, sont coupés en deux (en coupe équatoriale) et réunis dans une marmite. Je complète avec de l’eau à hauteur des fruits et je mets à cuire jusqu’à ce que les fruits se décomposent d’eux-mêmes. Ce n’est pas très long. Je les passe au chinois puis je rajoute autant de sucre que de pulpe obtenue. Dès que le sucre est fondu, après avoir ramené en ébullition, je mets en pots.Nul besoin d’ajouter de la pectine. L’acidité résiduelle fait merveille avec le foie gras, ou en confiture pour tartiner, ou en farce pour les petits sablés aux amandes…

La production de mon cognassier en 2022. / ©S.M

Belle réussite à vous qui réaliserez peut-être cette gelée maintenant avec les fruits oubliés de l’automne ou avec la nouvelle production à venir. En tous cas, ne manquez pas le fleurissement du cognassier du Japon. Peut-être, comme on dit au Québec, tomberez-vous aussi en amour avec lui.

Coings du japon nommés cananga. / ©S.M
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