mercredi 15 mai 2024
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Terrasses – Ou notre long baiser si longtemps retardé de Laurent Gaudé

Dans ce récit, l’auteur retrace ce que fut la nuit du 13 novembre 2015 à Paris. Un témoignage bouleversant et nécessaire pour ne pas oublier. Éditions Actes Sud.

C’était un vendredi 13, un vendredi où l’air était doux, un soir à contempler la vie et à regarder les étoiles. Vendredi 13 jour exceptionnel pour certains, banal pour d’autres, qui restera pourtant un jour sans fin pour tous, trou noir aspirant la vie et terrassant les âmes dans un chaos insoutenable et une plaie béante pour toujours.

De cet arrêt sur image, de cette longue agonie, de ces heures figées, de cette sidération, de cette amputation, de la mort s’invitant avec obscénité dans le quotidien des vies, des ciels ouverts à jamais obscurcis, Laurent Gaudé a écrit. Au travers de ses mots, on se laisse porter dans ce récit polyphonique d’une grande délicatesse où se frôlent les silhouettes prises en otage de cette nuit sans fin. Les voix s’entremêlent, elles font dialoguer la mort et la vie dans une même danse. Une amoureuse, des sœurs jumelles, une jeune mère se délestant pour la soirée de son quotidien, un urgentiste, des policiers, des passants, des pompiers qui nous rappellent cette mosaïque humaine que fut cette nuit. Si l’on tend bien l’oreille, on y entend ce qui durant ces heures interminables est venu se dire, se chuchoter, se hurler, se pleurer dans ces regards hagards, dévastés, dans ces yeux fermés à jamais.

Au cœur de l’effroi, on navigue à vue, et dans ces vies qui se sont tues, on se rappelle alors la nécessité de ne jamais oublier de célébrer la beauté de l’existence. C’est cela sans doute le sujet de ce récit. Avec empathie, élégance et pudeur, l’auteur nous livre les fragments d’une histoire qui nous concerne tous, permettant au cœur de ses mots de trouver un refuge contre la noirceur du monde, symbole d’une liberté que rien ne pourrait venir bâillonner. Face à ces vies qui se sont aimées, dansées et qui ont vibré intensément, il nous reste le devoir de perpétuer le souffle. Alors par ces mots précieux, permettant de rendre grâce à ce qui fut et ceux qui furent dans cette douceur d’un soir de novembre, Laurent Gaudé nous offre un récit bouleversant permettant de tisser un lien par-delà la mort et de se substituer aux silences, tel un chant universel et consolateur.

Isa sur insta

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