Au ras des pâquerettes

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Quand j’ai croisé ma voisine l’autre jour au supermarché, elle m’a immédiatement parlé de notre voisin du rez-de-chaussée, un type au ras des pâquerettes elle a dit. Puis elle a ajouté : le mec n’a que 5 cinq sujets de conversation : élection, guerre, Covid 22 (il pense que le chiffre évolue avec les années). Trois sujets de conversation, c’est déjà pas mal, j’ai répondu pour déconner. Ma voisine m’a tué du regard: mais enfin, il pourrait faire un brin de causette sur le féminisme, l’égalité, la littérature, l’avenir de nos enfants, le Riesling, l’éloge de la fuite, les lumières et la tendresse, bordel. Elle parlait fort ma voisine au rayon couches-culottes (aucun de nous deux ne savait pourquoi nous étions arrivés là). Je l’ai même vu faire des réserves de nourriture, elle a ajouté. Moi aussi, j’ai parlé avec notre voisin, il m’a avoué que, comme il est très généreux, il était prêt à accueillir des réfugiés ukrainiens, les femmes surtout, qu’il avait activé son compte Tinder. Les bons côtés de la guerre ! Je n’ai rien rapporté de ces propos à ma voisine qui aurait été capable de défoncer la porte de ce voisin qui ne manque pas d’air. Il ne lui en faudrait pas plus pour qu’elle se fasse la peau de ce type un peu trop enrichi en oxygène et qui ne fait rien pour la biodiversité. J’ai laissé ma voisine au rayon vegan et j’ai été défoncer la tête de notre voisin. Enfin, non. Mon éducation m’a empêché de faire une chose pareille, si quelqu’un a envie de rester au ras des pâquerettes c’est son droit, même si une pâquerette est bien trop jolie pour qualifier ce voisin, chez qui l’herbe n’est pas vraiment plus verte.