Les Maires face à la crise – Claude Sturni, maire de Haguenau

Le maire de Haguenau est à l’écoute de sa ville et du territoire comme d’un cœur qui aurait le souffle court. Le confinement, les décisions du gouvernement, son courrier à la Préfète, Noël qui perdra de ses éclats, les difficultés des commerçants et des artisans, le travail en commun avec la Fédération des Commerçants, Artisans et Prestataires de Services (CAP), sont les sujets que Maxi Flash a souhaité aborder avec lui.

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Claude Sturni, maire de Haguenau et Président de la Communauté d'Agglomération de Haguenau

Depuis l’annonce du confinement, vous avez écrit à la préfète Josiane Chevalier, mais vous n’avez pas pris d’arrêté, comme l’ont fait certains maires en France pour exprimer leur désaccord. Pourquoi ?

C’est illégal. Il faut éviter que des commerçants ouvrent et soient condamnés à payer des amendes. Je pense qu’il y a d’autres façons d’agir. On travaille, ça, c’est clair, même si ça ne donne pas toujours lieu à une communication publique.

Et ce courrier à la préfète, pourquoi ?

Pour prendre date. Il y a une urgence, et je ne voulais pas attendre la prochaine réunion avec elle pour lui confirmer nos inquiétudes.

Et dans ce que vous avez exprimé, il y a une forme de désespérance. Vous l’avez d’ailleurs écrit dans votre lettre, les commerçants sont désespérés !

C’est effectivement ce que l’on constate ces derniers jours. Il existe d’abord une incompréhension, et de l’angoisse. Beaucoup se demandent comment, dans ce contexte, ils vont arriver à survivre, comment ils vont sauver cette fin d’année, sachant que les ventes de cette période dans un certain nombre de secteurs représentent une part très importante de leur chiffre d’affaires et donc du résultat final.

Et vous menez un certain nombre d’actions, notamment avec l’association des commerçants ?

Oui, elles sont encore en cours, c’est un petit peu prématuré d’en parler, certaines seront soumises à la décision du conseil municipal et du conseil communautaire, car nous avons maintenu deux réunions planifiées les 12 et 16 novembre.

Le gouvernement a redit que les commerces seront aidés, je ne sais pas exactement ce que cela signifie, mais de votre côté, que pouvez-vous faire ?

La préfète a acté le fait que je souhaitais faire partie d’un groupe de travail autour de la numérisation de l’entreprise, l’un des axes dans lequel le gouvernement souhaite investir pour que les petits commerces puissent accélérer la numérisation et leur présence sur le Web. Moi, je défends l’intérêt du commerce physique, des commerçants qui tiennent boutique et qui sont présents sur le territoire. Je défends le fait que dans le centre-ville de Haguenau et dans le cœur des villes de l’agglomération, des commerçants accueillent leurs clients.

Ce qui est compliqué à comprendre, c’est que l’on accueille beaucoup de monde dans des supermarchés alors que l’on pourrait en accueillir moins dans des petits commerces près de chez nous. C’est compliqué de constater que, d’une certaine manière, l’on sacrifie les petits commerçants de proximité et que l’on met tout le monde en difficulté. La préfète, qui représente l’État, vous a-t-elle répondu ? Avez-vous le sentiment d’être entendu sur ce point ?

Elle m’a dit qu’elle a fait remonter ces éléments-là, et puis à défaut de pouvoir autoriser l’ouverture de certains commerces, le gouvernement a interdit aux grandes surfaces de vendre certains articles, c’est une façon de traiter le sujet. L’autre façon c’est, ce que j’ai évoqué plus haut, l’aide à la numérisation. Après, ce que j’entends surtout, et chaque jour qui passe nous apporte de mauvaises nouvelles, c’est que la situation est dramatique sur le plan sanitaire. Je ne souhaite mettre personne en danger, ni un artisan, ni un client, donc il faut trouver le bon équilibre. En espérant que ce confinement nouvelle version produise les effets que l’on attend et que d’ici quelque temps, on puisse se projeter vers un déconfinement et une réouverture des commerces. Pour l’instant les chiffres ne vont pas dans le bon sens, la crise sanitaire est devant nous.

Avez-vous le sentiment que c’est plus grave que lors du premier confinement ?

Je le crains.

Pour Noël, la ville de Haguenau a envisagé beaucoup de choses, cherché beaucoup de solutions, des chalets en bois seront quand même installés au cas où l’on sort du confinement plus rapidement que prévu, c’est une façon d’être optimiste, mais avec le sentiment que cet optimisme-là est illusoire, non ?

De toute façon, les illuminations qui ont été prévues seront mises en place, on ne peut pas imaginer que la ville soit plongée dans le noir. Ensuite, il y a quand même des flux au centre-ville, même dans cette période confinée. Vous l’avez dit, je suis un optimiste, mais un optimiste engagé, ce qui signifie qu’à un moment donné il faut oser des choses. C’est ce que l’on fait avec l’Office des sports et des loisirs, même si malheureusement nous allons renoncer à la patinoire ou au grand Carrousel qui avaient si bien marché l’année dernière.

Pour les prochains jours, qu’espérez-vous, qu’attendez-vous ?

J’attends que tout le monde soit raisonnable. Si tout le monde fait le nécessaire : sortir le moins possible pendant le confinement, porter le masque en permanence, assurer une distanciation physique, se nettoyer les mains, etc., si l’on fait ça, on doit pouvoir constater une amélioration. Mais malheureusement en ce moment nous sommes dans une phase de croissance exponentielle. Dans un drame, il faut chercher des points positifs, alors ce que j’attends dans notre travail avec la Cap, ce sont des idées et des moyens nouveaux. Je sais qu’il y en a qui innovent, qui font des choses, la collectivité est là pour les mettre en avant et encourager les autres à faire de même. Je sais qu’il y a des commerçants qui se bougent et j’en suis très heureux. Il faut essayer d’emmener tout le monde vers une vision plus optimiste, on essaye d’autres choses, on se retrousse les manches. Après la première vague, il y a eu des réussites, la fréquentation en ville était bonne, les terrasses étaient animées, sans mettre les gens en danger, je crois que nous avons fait les bons choix. Maintenant, pour cette saison automnale et hivernale, même s’il y a beaucoup d’incertitudes, c’est dans l’action que l’on peut regagner de l’optimisme.