Nos ados hyperconnectés, mais pas concentrés !

Si vous avez un ado à la maison, vous connaissez le sujet aussi bien que la dose de lessive à mettre dans la machine, ou le temps de cuisson de votre marque préférée de spaghettis. Quels sont les parents qui ne répètent pas dix fois la même chose, cent fois s'il le faut, pour un résultat navrant ?

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A cet âge décisif pour leur avenir, les ados sont de plus en plus distraits. Peu concentrés, car hyperconnectés à une multitude de sources d’infos, de bruits et de distractions, mais pas que. Dans tout cela, le rôle des parents reste essentiel.

À l’heure des ordinateurs, des téléphones portables, des jeux vidéo, comment aider nos ados à trouver, ou retrouver, le chemin de la concentration, élément indispensable de leur futur statut social ? Au-delà de la distraction, des vidéos sur YouTube, des story à compléter sur Instagram, d’un truc super important à faire sur Snapchat, d’une partie de FIFA ou d’une conversation au téléphone qui dure des heures, l’ado a de plus en plus de mal à se faire mal, sa capacité à faire quelque chose de difficile s’étiole. En cause, ses multiples activités cérébrales.

Notre cerveau n’est pas une machine, en cas de fatigue déraisonnable, il est inapte, pas loin de l’apoplexie. Pourtant, la génération 2000, hyperconnectée, prétend être capable de faire plusieurs choses à la fois : préparer une interro en étant sur Yubo et en regardant une série sur Netflix en même temps. De plus, s’il est « gavé » d’informations ou de données comme un estomac de Rhabarwerkueche (tarte à la rhubarbe), il sera incapable de s’arrêter sur quelque chose d’un peu déplaisant pour lequel la motivation est à aller chercher loin, un peu plus loin, très loin. Or, l’attention et la concentration restent les bases de l’apprentissage et de la mémorisation, un processus exigeant.

Le rôle des parents

Pour aider les jeunes gens à retrouver une bonne concentration quand c’est nécessaire, les spécialistes de la question sont d’accord sur la mise en place de stratégies et de réflexes, comme éloigner le téléphone portable (et activer la rubrique temps d’écran dans réglages sur les Iphones pour un contrôle plus efficace). Même s’ils sont plus autonomes et matures que la génération de leurs ancêtres, les dopés du smartphone ne sont pas capables de l’éloigner seuls. Pour cela, ils ont encore besoin de l’aide de leurs parents, comme pour organiser leur bureau et leur chambre, ce qui facilite également la concentration.

C’est aussi aux parents de leur répéter d’oublier le phantasme d’apprendre par plaisir et dans une grande facilité, sans réels efforts. Ceci est réservé à une toute petite minorité.

L’ado doit accepter le plus tôt possible qu’apprendre ne se fasse pas toujours dans la satisfaction et le bien-être, pour ne plus chercher à tout prix une stratégie d’évitement, alors que c’est impossible. Le discours des parents est essentiel là encore, l’enfant doit comprendre, qu’en souffrant aujourd’hui, il souffrira moins demain et qu’apprendre permet d’automatiser, donc de réduire l’effort à venir. Et puis, certains pensent que l’on doit comprendre immédiatement ce qu’on leur apprend, mais en fait, c’est la lenteur et la bonne assimilation qui fait progresser.

Les nouvelles technologies ne sont pas les uniques causes du problème de concentration chez les jeunes, il y a aussi les pensées parasites, des questions angoissantes et tout à fait légitimes que l’on se pose à cet âge-là. Les ados, particulièrement anxieux, se disent souvent avant de démarrer une tache scolaire : que vont penser mes parents si j’échoue ? Je ne vais pas y arriver, etc. Cette peur de l’échec est souvent provoquée par un blocage émotionnel. S’il parvient à se débarrasser de ses émotions négatives qui le détournent de la tâche sur laquelle il doit se concentrer, il peut inverser la tendance.

Aujourd’hui, on est tous un peu dans l’inquiétude permanente de passer à côté de quelque chose, on a trop de choses à faire à la fois, «on n’arrête pas», mais c’est un leurre. La cacophonie ambiante, les réseaux sociaux nous donnent le sentiment d’exister, jour et nuit si on le désire, alors que le silence et le calme sont fondamentaux pour le fonctionnement cérébral et pour notre santé.

Les moments de déconnexion sont très importants pour favoriser la créativité, la concentration, mais aussi la construction de soi. Et donc, l’estime de soi. D’où l’idée de dissocier le résultat scolaire de l’image de soi : une bonne note ne veut pas dire, « tu es intelligent », une mauvaise, « tu es stupide ! » Le jour où un élève obtient une mauvaise note, ce n’est qu’un accident qui peut arriver par manque de préparation, pas un jugement sur soi que l’ado prend inévitablement pour lui. Dans ce cas, la motivation et donc la concentration peuvent s’écrouler.

Il vaut mieux parler de l’effort que du résultat, ce qui l’aidera à prendre confiance en lui et en ses potentialités; du coup, une bonne concentration et une bonne attention seront plus faciles à gagner.

L’efficacité du déplaisir

Il arrive que ceux qui ont du mal à se concentrer souhaitent s’attaquer à un gros morceau, un pavé de 1000 pages d’un seul coup, ils abandonneront devant l’ampleur de l’effort à fournir. Il faut leur indiquer une stratégie très simple, se fixer des objectifs raisonnables, par exemple 10 pages par jour. C’est une contrainte, mais elle n’est pas irréalisable. Les spécialistes s’accordent à dire que si l’on n’introduit pas du déplaisir dans la vie d’un ado, il devient fragile et vulnérable devant l’obstacle.

Les parents de la génération qui a lu ou entendu parler de Françoise Dolto (Le complexe du homard, etc.) ont pris l’habitude de protéger, et même de surprotéger leurs enfants. Ils sont devenus restaurateurs ou hôteliers, hommes et femmes de ménage, chauffeurs de taxi, ramasseurs de miettes, préparateurs de sacs en tous genres ou banquiers de leur progéniture, le résultat était joué d’avance, les adolescents ne font rien à la maison.

Alors, s’ils n’ont aucune contrainte, comment peuvent-ils accepter la frustration devant un devoir et trouver la concentration indispensable pour faire un effort ?