mardi 5 novembre 2024

Odile Basler-Klein

Née en 1979 à Strasbourg, Odile Basler-Klein exerce le métier d’orthophoniste depuis 18 ans, à Mommenheim. Passionnée par son expérience quotidienne et les rencontres avec ses patients dyslexiques, elle vient de publier son premier livre, La dys de cœur. Quand les dyslexiques s’expliquent à cœur ouvert. Cet ouvrage, qui donne la parole aux dyslexiques, est ponctué de phrases très belles comme celle de Lou, 16 ans : « La dyslexie, c’est une lettre qui n’existe pas dans l’alphabet ». Ce concentré d’émotions vient de sortir aux Éditions Demdel (www.demdel-editions.com).

Vous êtes orthophoniste, ce qui était loin d’être votre idée de départ, non ?

C’est exact. Je n’ai pas eu un parcours linéaire, si on m’avait dit à 15 ans qu’un jour je ferais ce métier, je ne l’aurais pas cru. J’ai toujours été attiré par ce qui est artistique, j’ai fait un bac littéraire arts plastiques, mais je me suis vite aperçue que ce n’était pas si évident de vivre de son art. Très vite, je me suis retrouvée en Belgique pour une formation d’orthophoniste.

Dans votre livre, vous citez Victor Hugo : « aimer, c’est agir », ce n’est pas un hasard…

J’ai la sensation de remettre les gens en mouvement en les aidant à exprimer ce qu’ils ont de beau en eux, à aller chercher ça, et à s’épanouir dans la vie. C’est passionnant de faire ce chemin, d’avancer avec quelqu’un. J’interviens dès que la communication est touchée, suite à un AVC, pour l’expression orale, l’expression écrite ou le bégaiement, je vois des personnes dysphasiques, d’autres dys, mais je préfère travailler avec des dyslexiques. Ils me touchent. J’aime beaucoup leur sensibilité, leur manière d’être très particulière, je trouve que leur regard sur la vie est particulièrement beau, je me sens vraiment en accord avec eux, car ils empruntent souvent des chemins inhabituels, le monde ne les comprend pas toujours. Cela me parle beaucoup.

Et c’est aussi pour cette raison que vous avez écrit ce livre ?

J’ai vécu avec un dyslexique après mes études. Il était belge, c’était un grand amour. Il est malheureusement décédé en 2006 lors d’un semi-marathon, j’avais 26 ans, tout s’est écroulé. J’avais l’impression d’être en dehors du monde, mais avec le recul ce fut une expérience initiatique qui m’a considérablement rapproché des personnes dyslexiques, je suis en résonance complète avec elles. Je crois que j’ai développé une aptitude à les comprendre.

Mais de là à écrire un livre…

Il s’est imposé à moi… mais je ne me trouvais pas légitime, il y a déjà eu beaucoup de livres sur le sujet, et au niveau théorique il y a des personnes qui sont beaucoup mieux placées que moi, des neurologues très compétents… Comme je récoltais beaucoup de témoignages, un jour, l’un de mes patients m’a dit : « il faut que les autres comprennent mieux ce que l’on vit ». Finalement, il y a peu d’écrits sur le vécu des personnes dyslexiques. Je me suis lancée et j’ai trouvé un éditeur belge, pour le petit clin d’œil au destin. Ce livre est aussi une manière de rendre hommage à mon ami décédé qui avait lui aussi un projet de livre. Pour moi ce sont les personnes dyslexiques qui sont les mieux placées pour expliquer ce qu’est la dyslexie. À travers leurs mots, leurs dessins, leurs photos, j’ai voulu les laisser être. Je voulais de la couleur, quelque chose de vivant, que l’on puisse prendre ce que l’on a à prendre. Le cœur du livre, ce sont vraiment les témoignages, le vécu, avec aussi une partie un peu plus théorique, car on me demande souvent ce qu’est la dyslexie. On fait toujours le métier qui nous guérit et cela me plaît d’observer les chemins qu’empruntent les gens. 

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