Sandra Fischer-Junck, Wissembourg : une image à soigner

Elle y est née, fait ses études jusqu’au baccalauréat, a travaillé au sein de l’hôpital avant de s’installer comme infirmière libérale, mais jamais elle n’avait imaginé devenir maire de Wissembourg. Sandra Fischer-Junck, mariée et mère de deux adolescents, a remporté le second tour des élections municipales face au sortant Christian Gliech. Elle a reçu Maxi Flash dans son bureau où la ville entière défile depuis 7 mois.

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Comment se passe votre début de mandat ? 

Les trois premiers mois ont été très difficiles. On était déjà fatigué d’une très longue campagne, pendant tout ce temps j’ai continué mon activité, même si en juillet et août je n’ai pas réussi à travailler en tant qu’infirmière. Depuis septembre, j’ai repris cinq demi-journées par mois. Cela me fait du bien d’aller voir mes patients. Je garde les pieds sur terre, cela fait 22 ans que je suis sur le territoire. 

Devenir maire n’était pas l’objectif de votre vie !

Absolument pas. Je n’étais pas destinée à cela. Je me suis lancée dans cette campagne en 2019 avec quelques élus de l’opposition, car pendant six ans, j’ai côtoyé mon prédécesseur, et je ne pouvais pas laisser cette ville dans les mains de ce monsieur. Il n’a pas écouté les citoyens. Je me suis fait traiter de Barbie, de petite conne, de vierge effarouchée, en plein Conseil municipal. Chacun peut apporter des idées, et ça, ça manquait.

Comment a réagi votre famille ?

Pendant la campagne, mon mari m’a énormément soutenu, il m’a accompagné à toutes les réunions. Je ne me serais pas lancée sans son soutien. Depuis mon élection, j’aime discuter avec lui le soir en rentrant, car il a une autre vision des choses, il m’oblige à aller plus loin dans mes réflexions.

On dit qu’il est très présent dans votre travail. C’est un conseiller privé ?

Absolument pas. On m’a d’ailleurs posé la question en plein Conseil municipal. Mon équilibre c’est notre amour et nos enfants, nous sommes effectivement assez fusionnels, nous partageons beaucoup de choses, nous avançons ensemble, nous avons fondé notre famille, c’est aussi pour ça que je suis la personne que je suis aujourd’hui. Nous prenons des décisions ensemble, mais pas celles de la mairie. C’est vrai que je ne suis plus beaucoup à la maison. Il passe me faire un petit coucou, nous prenons parfois un café entre midi et deux heures. Il n’est pas embauché par la mairie, il a même acheté son paquet de café. 

En arrivant, vous avez commandé un audit financier. Où en êtes-vous ? 

Nous allons faire une annonce publique avant le débat d’orientation budgétaire. De cet audit financier découlent les choix que nous allons faire pour les investissements. Il y en aura, mais nous allons aussi nous serrer la ceinture pendant deux ans et demi. 

Dans votre programme pour le logement, il y avait « Développer une politique novatrice du logement, adaptée aux besoins et à prix accessibles, en particulier pour les jeunes. Favoriser la réhabilitation du bâti ancien ». Où en êtes-vous ? 

Nous travaillons beaucoup avec les ABF (Architecte des bâtiments de France). Et nous avons candidaté à Petites villes de demain, (programme qui vise à améliorer les conditions de vie des habitants des petites communes) et nous l’avait obtenu. Certains propriétaires auront droit à des crédits d’impôt et des aides supplémentaires pour le financement et la restauration du bâti ancien. Et puis, il faut que les gens reviennent habiter ici, que les services soient maintenus ou développés. La redynamisation du centre-ville, ce n’est pas seulement la présence des commerces.

En parlant de bâti ancien, vous avez annulé la vente du Musée, pourquoi ? 

Quand nous sommes arrivés en juillet, il fallait signer la vente, mais je n’avais jamais visité cet endroit. Je me suis dit que l’on pouvait peut-être faire quelque chose à moindre coût ou trouver une autre solution.

Et qu’allez-vous en faire ? 

Pour le moment, je ne sais pas. C’est vrai que c’est un très beau bâtiment, mais qu’il y a énormément de travaux à prévoir. Et comme je vous l’ai dit, nous n’avons pas trop d’argent pour l’instant…

…Du coup c’était peut-être mieux de le vendre ? 

Je ne sais pas. Peut-être. Il y a une autre proposition à l’étude, nous allons avancer, mais je ne sais pas encore dans quel sens.

Dans vos projets, il y avait aussi l’embellissement de la ville. Wissembourg, et vous le reconnaissez, est restée très belle. Avant la crise sanitaire, il y avait par exemple très peu de locaux commerciaux vides. 

J’ai toujours dit pendant la campagne que tout n’était pas mauvais lors du mandat de Christian Gliech. Je parlais de la zone de rencontre à 20 km/h mise en place il y a quelques années, c’est une excellente idée, c’est un bon compromis, sauf que cela s’est arrêté à mettre des panneaux. Je pense qu’il y a un travail à faire, j’ai une équipe qui commence à y réfléchir. Pour le commerce, nous ne sommes pas dans la même situation que certaines villes de France où tout est fermé, mais, comme dirait mon mari, c’est un mec qui tombe du 60e étage et qui au 40e dit
« jusqu’ici tout va bien ». 

Dans la campagne vous avez parlé de déclin, en évoquant une baisse de la population, mais ce n’est pas propre à Wissembourg.

C’est vrai, on sait que les gens vont plus vers les grandes villes, mais ce déclin a provoqué la fermeture de certains services, dont la sous-préfecture. Ce n’est pas rien. Mille habitants en moins lors des dix dernières années, cela signifie que des services hospitaliers ou des classes d’école risquent de fermer. 

Peut-être qu’avec la crise sanitaire, les gens auront envie de vivre un peu plus à la campagne ?

On peut l’espérer, c’est vrai que les gens nous disent que c’est très beau chez nous, que c’est calme et agréable. Mais il y a un travail à faire sur les cadences des trains notamment. Nous avons un grand projet sur le secteur gare pour développer la multimodalité, l’accueil touristique et économique. 

Vous avez dit que vous vouliez mettre le citoyen au cœur de votre projet, mais en ce moment le citoyen est plutôt enfermé chez lui, c’est compliqué !

Oui, et il me manque terriblement. Je pense que le jour où l’on aura le droit de sortir, cela sera explosif. 

Pour finir, comment vous sentez-vous dans le costume, ou plutôt la jupe (jaune) de maire ?

Je suis assez sereine, je ne dis pas que c’est facile tous les jours, parfois il faut trancher, mais je crois à la bonté des gens. Je pense que l’on peut dire que l’on s’est trompé, ou que l’on ne sait pas. C’est aussi ma déformation professionnelle, il y a des choses tellement plus graves dans la vie. Moi c’est Sandra, et mon bureau est toujours ouvert. Je resterai une maire de proximité, accessible.