Steve Maire reçoit Sébastien Loeb

Pour Maxi Flash, le trublion réalisateur Steve Maire interroge régulièrement une personnalité alsacienne, au coin du feu. La série se poursuit avec son ami nonuple champion du monde, autour d’un brasero très actif au bord du lac Léman. Le Haguenovien avait rarement parlé autant. (L’intégralité de cet entretien est à voir sur la chaîne You Tube et les réseaux sociaux de Steve Maire. Vous découvrirez le péché mignon des deux hommes, arrivé directement d’une boucherie bien connue à Haguenau).

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Steve Maire : Merci Sébastien de nous accueillir chez toi. Pour commencer, j’aimerais savoir si tu te souviens du moment où tu t’es rendu compte que tu étais doué pour le sport automobile.

Sébastien Loeb : Je me débrouillais très bien avec les vélos, je faisais des roues-arrière tout ça et un jour j’ai participé à une course de mobylettes, Les six heures de Haguenau. J’avais fait une autre course à Strasbourg, et j’étais devant les copains. C’était du deux-roues, mais c’était déjà du pilotage, j’adorais ça. Ensuite, lorsque j’ai eu mes premières voitures, on roulait sur la route à l’époque, y avait pas mal de monde avec des 205 GTI, des trucs comme ça, les voitures avaient moins de puissance que les grosses caisses d’aujourd’hui, mais elles étaient amusantes à conduire. Globalement, je me débrouillais plutôt pas mal, mais j’avais à peine les moyens de mettre de l’essence dans le réservoir.

Et la suite on la connaît, tu as rapidement gagné des courses, malgré quelques voitures cassées quand même, comme la fameuse Saxo verte, en 98 !

Elle a failli me coûter vraiment cher. Elle n’était pas assurée pour les essais. J’étais encore un peu jeune, un peu con, j’étais un peu livré à moi-même. À un moment, j’étais de nuit, à bloc, je suis parti en tonneau, j’ai tout cassé et j’ai raconté que c’était un chevreuil, mais il n’y avait pas de chevreuil. À chaque fois que je croise mon adversaire de l’époque, il me dit qu’il a vu le chevreuil avec le cul vert (rire). Après, il a fallu se réinventer, trouver des financements, puis il y a eu le rallye de San Remo où j’ai fini deuxième, le déclenchement de tout. Avant, j’envoyais des fax aux constructeurs pour leur offrir mes services, après on m’a proposé des contrats.

Un mot sur la rencontre avec Daniel Elena, qui a été ton copilote pendant très longtemps. Vous avez passé quelques années de galère ensemble, vous avez même habité chez ta mère !

Pas vraiment galère en fait. On n’avait pas beaucoup d’argent à l’époque, on était deux potes, on dormait sur le canapé de ma mère, mais bon, on avait la chance de pouvoir faire des rallyes, alors entre vivre cette vie-là, et aller à l’usine, on ne peut pas dire que j’ai vécu une période de galère, même si l’on devait bosser un peu à côté et se débrouiller.

Tu sais que l’on a un point commun, on a fait un BEP électro. Tu as connu ce monde-là, les chantiers à 17/18 ans. Au fait, tu as eu le brevet ?

Oui, et avec une meilleure note que toi, surtout en maths.

Tu avais une mère prof de maths…

Tu sais combien j’ai eu au brevet, en maths ?

Je ne sais pas, 16 ?

20 !

Ce n’est pas possible. Ça n’existe pas… Sérieux ?

Oui. 20 en maths, 16 en français, 8 en histoire. Après, j’ai fait une première scientifique que j’ai redoublée. La deuxième année était pire et j’ai commencé à faire des petits boulots. J’ai bossé chez Duravit, je fabriquais des supports pour les chiottes. J’ai gagné un peu de sous et plutôt que de me motiver pour aller à l’école, ça m’a motivé pour continuer à travailler. Je me suis acheté une voiture. Tout ce que je suis en train de dire n’est pas exemplaire, on est bien d’accord !

J’ai eu la chance d’avoir du talent et d’y arriver, mais je ne suis pas un exemple à suivre.

Lorsque ma mère voyait ce que je faisais à l’école, je crois qu’elle avait plutôt honte. Malgré tout, même avant d’être pilote officiel, mes parents m’ont toujours soutenu. Ils venaient souvent sur les courses. Mon père est mort en 2005, il n’a connu qu’un seul de mes titres de champion du monde.

En 2009, il a été question de Formule 1. Tu peux me dire un mot là-dessus ?

À la base, c’était une séance d’essai, pour le plaisir, parce que j’étais champion du monde et que j’étais sponsorisé par Red Bull. Ils m’offraient toujours des petits cadeaux, et là c’était de participer à une séance officielle de F1. Je monte pour la première fois dans une F1 et je fais le 8e temps sur 16, ça leur a donné des idées, mais finalement on a décidé que la priorité restait le rallye.

On s’est connu lors du Rallye de France, en Alsace en 2010. Ça reste un souvenir extraordinaire ?

Ce sont les souvenirs les plus marquants pour moi. J’ai gagné le rallye et en même temps le titre de champion du monde des pilotes, on gagne le titre constructeur, tout cela à Haguenau, ma ville natale, devant la famille, les potes et tout le monde, c’était un moment incroyable.

À part la naissance de ta fille Valentine, quelle est la plus belle chose qui te soit arrivée ?

La chance d’avoir fait cette carrière en rallye. Elle a déclenché tout le reste, toutes les autres courses, toutes les rencontres que j’ai pu faire, et cela m’a permis de construire ma maison ici.