A 9h, en semaine, les bruits de casseroles et de vapeur s’échappent des cuisines, tandis qu’un jeune homme s’affaire à l’aspirateur : « Les travailleurs arrivent à 8h15 et vont tous en cuisine, sauf un en salle », montre Nicolas Jamain, le responsable restauration de l’ESAT de Haguenau (Établissement et service d’aide par le travail).
« À 11h, une partie continue en cuisine, et l’autre va au service. Un restaurant reste un restaurant », sourit celui qui a passé vingt ans dans les armées. Originaire de Champagne-Ardenne, il a voulu « se poser et donner du sens : le handicap était abstrait pour moi, mais j’ai adapté ma pédagogie ». Ici, les postes fonctionnent tous par fiches : une tâche, une case à cocher. « Pour la crème brûlée, une étape c’est une phrase ou une photo. Nous les accompagnons, mais ne les maternons pas, et débriefons toujours », explique le responsable, à la tête de six encadrants.
Et chaque nouvelle semaine a sa carte : la pièce du boucher (et sa cuisson à respecter), la suggestion (plus élaborée), le burger (qui remporte tous les suffrages) et le plat du jour. « C’est notre produit d’appel, à 8€. Il s’agit du repas amélioré de nos clients livrés, puisque nous assurons la restauration collective—notre cœur de métier—des foyers, de périscolaires, soit 450 à 500 couverts ». Et ça tourne rond, « une organisation militaire !
plaisante Nicolas Jamain. C’est un semi-self, les clients passent au buffet d’entrées et desserts, puis sont servis à table ». À l’accueil, à la caisse, « nous ne voulions pas de bornes, pour établir un contact avec la clientèle. Le but est de leur donner envie de travailler en salle, sur la base du volontariat et des capacités ».
Kyara à Master Chef
C’est le cas de Kyara, qui est à L’Initiative depuis un an et demi et, progressivement, teste le service au bar. « Je suis fière de travailler ici, mes moniteurs sont contents, le chef nous montre et si c’est moche, on refait », assure la jeune femme de 21 ans, tout sourire. Originaire de Batzendorf, elle vient seule tous les jours en bus.
Elle qui a fait de nombreux stages avant de trouver sa place, apprécie tous les postes, « un peu moins la plonge, mais il faut bien la faire ! » Kyara est encore sur un petit nuage, la veille, elle a participé au Trophée des ESAT : « C’est comme Master Chef, on a fait un plat et un dessert diététiques devant un jury étoilé. C’était stressant, j’étais émue, mais tout le monde a aimé ». Un constat décidément unanime !