Lampertsloch – Le jour où Georgette, 94 ans, a décidé d’accepter les choses avec humour

C’est dans le village de Hoelschloch que Georgette voit le jour en janvier 1929. Elle réalise bien jeune que la vie est faite de contraintes et, surtout, elle apprend à bien les vivre et à en rire.

0
1546
©DR

Quand on germanise son prénom en Georgina dans l’Alsace annexée où elle fréquente l’école allemande, elle décide de prendre les choses à la rigolade! Georgette relate avec autant de bonne humeur son «Pflichtjohr» qui la menait chaque semaine à Wissembourg en train. Cette «année obligatoire», sans laquelle aucun autre apprentissage ne pouvait être entamé, devait préparer les jeunes filles à leur futur rôle de mère au foyer et représentait une main-d’œuvre pour remplacer les hommes partis au front. Elle se souvient, tout sourire, d’avoir passé des demi-journées entières à attendre devant le magasin d’alimentation avec ses tickets de rationnement : une couleur par type d’aliment de première nécessité.

Après la guerre, son vélo la mène à la tannerie de Surbourg où l’on travaille le cuir de veau à l’usage de chaussures. Georgette y est employée à la découpe et à la coloration, limitée au noir, brun et acajou, explique-t-elle joyeusement. Elle quitte son travail après avoir rencontré l’homme de sa vie, par le biais d’un ami commun. C’est un jour où elle fait ses courses à vélo dans un magasin de Merkwiller, le village voisin dans lequel ce dernier exerce le métier de menuisier.

Une fois mariée avec Albert, elle s’installe dans la maison de sa belle-famille à Lampertsloch où ils élèvent ensemble leurs six enfants, parmi lesquels une paire de jumeaux dont Georgette évoque l’arrivée surprise dans un grand éclat de rire. La voilà donc bien occupée, avec six gourmands à table et un seul salaire pour tenir tout son ménage. Elle cultive ses légumes et ses patates, élève lapins et poules, pour pas trop avoir à acheter. Elle se souvient avec amusement d’avoir cuisiné des marmites pleines !

Les dimanches après-midi se déroulent dans la simplicité de randonnées dans la forêt environnante et durant les soirées, Georgette tricote des chaussettes en laine, les meilleures selon Albert, pour garder les pieds au chaud durant l’hiver. Elle raconte en s’esclaffant que les chaussettes en laine servaient aussi à envelopper la yaourtière non électrique, afin de permettre de garder la chaleur du lait pour une meilleure fermentation.

Georgette reprend un peu son sérieux pour évoquer sa passion: une fois les enfants partis de la maison, elle s’adonne à son activité manuelle préférée, plus ornementale qu’utile : la broderie au point de tige. Un travail précis qu’elle apprend seule et qui lui vaut de pouvoir parler fièrement de toutes ses réalisations : coussins avec motifs alsaciens, cache-torchons, nappes, napperons, tabliers de conscrits. Georgette se réjouit de montrer que tous ses ouvrages peuvent être retournés, car ils sont aussi jolis à l’envers qu’à l’endroit ! Aujourd’hui sa vue lui fait défaut et ne lui permet plus d’exercer sa passion, mais l’enthousiasme reste entier. Et le rire aussi !

Line